Même si le monde
parvient à limiter le réchauffement à 2°C, les conséquences pour la
biodiversité et l'humanité seront désastreuses, alertent des
scientifiques qui détaillent plusieurs scénarios.
Hausse des mers, perte de biodiversité, accès compliqué à la
nourriture, niveau de vie en baisse... Même si le monde parvient à
limiter le réchauffement à 2°C, les conséquences seront désastreuses,
selon une vingtaine d'études
publiées le 2 avril 2018 dans la revue britannique Philosophical Transactions of the Royal Society A. "
Nous
décelons des changements importants dans les impacts climatiques pour
un monde à 2°C, donc nous devons prendre des mesures pour l'éviter", explique à l'AFP Dann Mitchell, de l'université de Bristol, auteur principal du texte qui introduit ce numéro spécial.
Plus de deux ans après la signature de l'accord de Paris qui vise à
maintenir la hausse du thermomètre sous 2°C, voire 1,5°C, par rapport à
l'ère pré-industrielle, la vingtaine d'études comparent notamment
l'incidence des deux scénarios. "
L'un des défis concerne la vitesse à laquelle nous atteindrons +2°C",
explique M. Mitchell. Autrement dit, le temps que le monde aura ou non
pour s'adapter aux multiples conséquences du réchauffement climatique.
Le groupe des experts du climat de l'ONU (Giec) doit publier en octobre
un rapport sur une éventuelle planète à +1,5°C. Le projet de texte
estimait d'ores et déjà, en janvier 2018, qu'au vu des engagements
actuels des pays et des trajectoires d'émissions de CO2, il était "
extrêmement improbable" d'atteindre cet objectif.
Le niveau de la mer continuera à s'élever "pendant au moins trois siècles"
Même si la montée de température se stabilise à +1,5 ou +2°C, le niveau de la mer continuera à s'élever "
pendant au moins trois siècles",
de 90 ou 120 cm d'ici à 2300, selon une des 20 études compilées par les
chercheurs. S'ensuivront inondations, érosion et salinisation des
nappes phréatiques. Plus le scénario est optimiste, plus les îles du
Pacifique, le delta du Gange ou les villes côtières auront du temps pour
construire des défenses ou déplacer des populations. Si rien n'est fait
pour limiter les émissions de CO2, la hausse moyenne du niveau de la
mer, provoqué par la fonte de glaces et la dilatation de l'eau,
atteindra 72 cm d'ici à 2100. Mais cette perspective est variable en
fonction des températures. Elle est ainsi estimée à 65 ans pour le
scénario à +2°C, tandis qu'elle pourrait atteindre 130 ans si le
changement climatique est maintenu à +1,5°C. "
Les impacts pour le XXIe siècle sont plutôt reportés qu'évités", notent ainsi les chercheurs.
Un accès plus difficile à la nourriture
Selon les études, une hausse des températures va entraîner une plus
grande insécurité alimentaire à travers le monde. Cela sera la
conséquence à la fois d'inondations et de sécheresses plus importantes.
Un réchauffement de 2°C rendraient plus vulnérables à la pénurie des
pays comme le Bangladesh, Oman, la Mauritanie, le Yémen et le Niger. Au
contraire, le Mali, le Burkina Faso et le Soudan verraient leur
situation s'améliorer légèrement puisqu'ils souffriraient de sécheresses
moins rudes. Mais il s'agit d'une "
exception", selon le professeur Richard Betts, qui a conduit une des 20 études. En cas de réchauffement de 1,5°C, "
76% des pays étudiés enregistreraient une augmentation plus faible de leur vulnérabilité à l'insécurité alimentaire", rapportent les chercheurs.
Des pays pauvres encore plus pauvres
Si une augmentation des températures de +1,5°C ne devrait pas changer grand chose à la croissance économique mondiale, "
un
réchauffement de 2°C laisse entrevoir des taux de croissance
considérablement plus bas pour de nombreux pays, en particulier autour
de l'équateur", indique à l'AFP Felix Pretis, économiste à l'université d'Oxford. "
Les
pays déjà pauvres aujourd'hui devraient devenir encore plus pauvres
avec le changement climatique, et plus en cas d'augmentation des
températures de +2°C que d'une augmentation de +1,5°C. Les pays riches
seront probablement moins touchés", souligne Felix Pretis.
Une différence significative pour la biodiversité
Si une hausse des températures chamboulera une partie de la faune et de la flore, "
contenir
le réchauffement à 1,5°C plutôt qu'à 2°C (...) permettrait d'augmenter
de 5,5% à 14% les zones du globe qui pourraient servir de refuge
climatique aux plantes et aux animaux", souligne une autre étude. Leur superficie équivaudrait à celle du "
réseau actuel des zones protégées".
De plus, limiter le réchauffement climatique pourrait réduire de près
de 50% le nombre d'espèces risquant de voir leur habitat naturel réduit
de moitié.
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