lundi 19 décembre 2016

OGM : l’INRA pointe une recherche sous influence

Selon une étude menée par l’Institut national de la recherche agronomique, une importante proportion d’articles scientifiques consacrés aux OGM est entachée de conflits d’intérêts.

Pas moins de 40 % de conflits d’intérêts. Le chiffre, frappant, caractérise tout un corpus d’articles scientifiques portant sur les organismes génétiquement modifiés (OGM). Voilà la première conclusion d’une étude publiée par une équipe de chercheurs de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) dans la revue scientifique PLOS ONE, le 15 décembre. Seconde conclusion : ces conflits d’intérêts ont une influence patente sur les résultats de ces publications. Quand conflit d’intérêts il y a, « les conclusions ont 49 % de chances d’être plus favorables aux intérêts des industries semencières », écrivent les chercheurs.
Ce n’est pas l’intégralité de la littérature scientifique sur les OGM qui a été ici analysée, mais un ensemble de 672 articles publiés entre 1991 et 2015 sur une question bien précise. Ils concernaient l’efficacité et la durabilité de l’efficacité de certains OGM qui produisent les protéines d’une bactérie, Bacillus thuringiensis (Bt). Toxiques contre des insectes qui les infestent, les plantes OGM Bt sont principalement utilisées pour les cultures de maïs, de coton et de soja. Comme il est rare que ce type de revues systématiques inclue un aussi grand nombre d’articles, les conclusions en sont d’autant plus significatives.
Fait notable, c’est la première étude de cette importance portant sur les conflits d’intérêts dans le domaine des OGM. 

mercredi 23 novembre 2016

La production végétale française dépendant de l'action des pollinisateurs atteindrait 5 milliards

Une étude du CGDD montre que la part de la production végétale destinée à l'alimentation humaine qui dépend de l'action des insectes pollinisateurs représente en France une valeur comprise entre 2,3 et 5,3 milliards d'euros.

On sait que les pollinisateurs, et en premier lieu les insectes, jouent un rôle incontournable dans la production végétale mais l'évaluation économique du service de pollinisation n'est pas chose facile. Le Commissariat général au développement durable (CGDD) a pourtant mené à bien l'exercice dans le cadre d'un premier volet de l'Evaluation française des écosystèmes et des services écosystémiques (Efese). Les résultats de cette évaluation ont été publiés le 21 novembre.
Cette analyse fait écho aux travaux internationaux réalisés par la plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) qui a publié un rapport d'évaluation sur les pollinisateurs en février 2016. La version française du résumé à l'intention des décideurs de ce rapport est rendue publique ce 22 novembre. L'évaluation menée par le CGDD vise également à appuyer le plan national d'action France Terre de pollinisateurs lancé en mai 2015.

mardi 1 novembre 2016

Dramatique: ce qu'il ne fallait pas faire : Monsanto ajoute Crispr à son arsenal

Décidé à cultiver au maximum le génie génétique végétal, le géant américain de l’agro-alimentaire Monsanto vient d’acquérir les droits d’exploitation de l’outil moléculaire Crispr-Cas9 auprès de l’institut Broad (Cambridge, Etats-Unis), spécialiste de génomique. Grâce à cet accord non exclusif, la firme (sur le point de se faire racheter par la compagnie chimique et pharmaceutique allemande Bayer) espère concevoir des végétaux d’un genre nouveau capables d’une plus grande productivité.

Des semences plus résistantes

Le défi agricole de demain est de taille. « L’équivalent d’un département agricole disparaît tous les huit ans, rien que dans notre pays, souligne ainsi Yann Fichet, directeur des Affaires Institutionnelles et Industrielles de Monsanto France. A l’échelle mondiale, et à l’heure de bouleversements climatiques importants, comment parviendrons-nous alors à nourrir 9 milliards de terriens d’ici 2050 avec moins de terres agricoles qu’aujourd’hui?  » Selon Monsanto, la solution ne pourra venir que de semences plus résistantes et productives. Crispr-Cas9, puissant outil d’édition génétique, permettra de les obtenir. Crispr aide en effet à développer des plantes génétiquement modifiées beaucoup plus rapidement et efficacement que ce qui s’est pratiqué jusqu’ici. Rappelons qu’il faut attendre une quinzaine d’années avant qu’un OGM ne puisse débarquer sur le marché. Mais, en France, où les OGM sont persona non grata, une raison annexe se profile : de quoi Crispr est-il le nom ? Comment qualifier les productions végétales que cette nouvelle technique autorise ? Sont-elles encore des OGM ?

"C’est un gros danger si ces futures plantes ne sont ni tracées ni étiquetées" - Arnaud Apoteker

Non, il ne s’agit pas d’OGM, estiment certains lobbys telle l’Association Française des Biotechnologies Végétales (AFBV) et son président Alain Deshayes : il est « nécessaire de trouver une voie pour que les plantes modifiées par Crispr ne passent plus par la nouvelle directive OGM édictée en 2015 restreignant leur culture », nous a-t-il déclaré. Pour certains chercheurs, comme Fabien Nogué de l’Inra de Versailles, « les plantes issues de cette technologie seraient indiscernables génétiquement des plantes sauvages. Je n’ai aucune raison de penser que cette technologie Crispr présente le moindre danger ». D’autres sont moins affirmatifs. Selon Arnaud Apoteker du Criigen (Comité de recherche et d’information indépendantes sur le génie génétique), qui fut responsable de la campagne OGM pour Greenpeace France, « même si on prétend avec Crispr-Cas9 être beaucoup plus précis, plus ciblé, avec moins d’effets “hors-cible“, c’est un gros danger si ces futures plantes ne sont ni tracées ni étiquetées ».
 Il est vrai que la technologie Crispr, bien que très puissante et précise, est encore toute récente. Développée en 2013, elle fait actuellement l’objet d’une véritable foire d’empoigne entre tous ses co-découvreurs pour la paternité de ses droits d’exploitation. D’un point de vue scientifique, beaucoup de chercheurs préfèrent rester prudents sur l’étendue de son potentiel et ses possibles effets délétères.

3 restrictions posées

A priori, Monsanto sera soumis à des limitations. Les restrictions posées par l’institut Broad sont au nombre de trois. Pas de « gene drive », une technique permettant d’amplifier un gène au sein d’une population. Potentiellement capable d’enrayer une maladie transmise par des moustiques ou d’éliminer des ravageurs de culture, la stratégie « gene drive » a également le potentiel de dérégler tout un écosystème et pourrait constituer une menace pour l’environnement. D’autant plus si elle tombait entre de mauvaises mains. Deuxième limitation: interdiction de rendre les graines stériles. Et là, on pense à la technologie “Terminator“ développée voilà quelques années par Monsanto et abandonnée depuis, et qui aurait rendu l’agriculteur encore plus dépendant des semenciers qu’il ne l’est déjà aujourd’hui. Enfin, la dernière limitation posée par l’institut Broad concerne le tabac et prohibe tous travaux qui viseraient à accroître l’usage et l’addiction à cette substance préjudiciable à la santé et ce, en dehors des travaux fondamentaux puisque le tabac est également une plante-modèle prisée par de nombreux laboratoires.
Quels seront les premiers produits à sortir des serres du semencier ? Mystère. « Il est trop tôt pour spéculer quant aux applications potentielles de cette technique prometteuse et sur quelles semences elle pourrait se révéler utile », nous a-t-on répondu au siège social américain le 11 octobre 2016. Affaire à suivre donc, dans les laboratoires, les champs ou… nos assiettes.

samedi 29 octobre 2016

Migraine : des bactéries de la bouche en cause ?

La survenue de migraines, qui touchent 11 millions de personnes en France, est-elle liée aux bactéries présentes dans la bouche ? Cette théorie surprenante est avancée par des chercheurs américains.

Le taux de bactéries présentes dans la bouche a-t-il une influence sur la survenue de migraines ? C'est ce que suggèrent des chercheurs de la San Diego School of Medicine (États-Unis) dans la revue mSystems. "Par des techniques de séquençage à haut débit, nous avons détecté des taux de bactéries buccales plus élevés chez les personnes migraineuses comparées à celles ne souffrant pas de céphalées (NDLR : maux de tête)", résument-ils. Une piste surprenante pour cette affection qui se manifeste par des maux de tête durant de quelques heures à quelques jours, et dont l'origine est communément "liée à des facteurs génétiques complexes associés à d'autres, environnementaux", résume l'Inserm. Touchant 11 millions de personnes en France, la migraine résulterait d'une stimulation nerveuse qui entraîne une inflammation des neurones et une dilatation des vaisseaux cérébraux, notamment des artères des méninges (membranes protégeant le cerveau, tronc cérébral et moelle épinière).

Des bactéries indispensables qui dégradent les nitrates

L'équipe de recherche a effectué 343 prélèvements buccaux de personnes migraineuses et non migraineuses. Les volontaires ont aussi renseigné les scientifiques sur leur alimentation et la fréquence de leurs maux de tête. Verdict : le taux de bactéries Rothia mucilaginosa et Haemophilus parainfluenzae étaient plus élevé chez ceux présentant des céphalées, sans pour autant que la distribution des autres espèces bactériennes de la bouche soit différente. Or Rothia mucilaginosa et Haemophilus parainfluenzae ont la particularité de réduire les nitrates, présents dans notre alimentation (chocolat, vin, charcuterie, légumes verts...) mais aussi dans des médicaments. Cette réaction chimique permet de transformer les nitrates en nitrites et en oxydes nitriques, des éléments essentiels pour le bon fonctionnement du système cardio-vasculaire (les oxydes nitriques améliorent la circulation sanguine et réduisent la pression artérielle). Une transformation que le corps humain ne peut pas faire sans ces bactéries. Reste une question : ces bactéries seraient elles une cause ou une conséquence de la migraine ? Le Dr Embriette Hyde, chercheuse et coauteure de l'étude, penche pour la première solution. "Lors d'une prise alimentaire ou médicamenteuse d'un élément riche en nitrates, ces bactéries présentes dans la bouche dégradent massivement le nitrate, ce qui pourrait déclencher des crises migraineuses", explique-t-elle. Mais le lien entre nitrates et migraines n'est pas encore scientifiquement établi. Il a été suggéré par de précédents travaux, qui ont notamment mis en évidence que 4 patients cardiaques sur 5 prenant des médicaments contenants des nitrates souffrent régulièrement de maux de tête. Une piste à surveiller.

mercredi 12 octobre 2016

Générations futures alerte à nouveau sur la contamination de l'alimentation par les perturbateurs endocriniens

L'association Générations futures poursuit sa mission d'alerte en publiant une nouvelle étude sur la contamination de l'alimentation par les perturbateurs endocriniens (PE). Elle a, cette fois-ci, analysé un aliment constitutif du petit-déjeuner : le muesli. Dans ce nouveau rapport EXPPERT pour Exposition aux pesticides perturbateurs endocriniens, l'association publie les résultats d'analyses effectuées sur 15 paquets de muesli issus de l'agriculture classique et 5 issus de l'agriculture biologique.
"100% des échantillons non bio analysés contiennent des résidus de pesticides, aucun des échantillons bio analysés n'en contient !", conclut l'association. Plus précisément, dans les 15 échantillons non bio testés, 141 résidus ont été retrouvés au total dont 70 ont pu être quantifiés. Parmi ces 141 résidus, 81 sont des PE suspectés, soit 57,44% du total. L'association a également calculé que la concentration moyenne de résidus quantifiés par échantillon non bio analysé est de 177 mg/kg.
Si ces concentrations ne sont pas illégales et ne semblent pas dépasser la dose journalière admissible pour une consommation de 50 à 100 grammes de produit, l'association compare les doses aux normes admises pour l'eau potable. La concentration retrouvée dans les mueslis est ainsi 354 fois plus élevée que la concentration maximale admissible (CMA) tolérée dans l'eau de boisson pour l'ensemble des pesticides. L'association utilise surtout les résultats de son enquête pour sensibiliser l'opinion sur la présence des PE dans l'alimentation. Elle enjoint à cette occasion la Commission européenne de modifier les critères définissant ces substances qu'elle a présentés en juin dernier. "Cette définition est très loin d'être à la hauteur des enjeux sanitaires en matière de protection des populations. L'omniprésence des cocktails de perturbateurs endocriniens dans notre environnement est confirmée par ce rapport. Cela doit impérativement être pris en compte par la Commission européenne qui doit revoir ses critères pour les rendre réellement protecteurs", conclut François Veillerette, porte-parole de Générations futures.

mardi 4 octobre 2016

Les abeilles menacées par la production d’amandes en Californie

Depuis 2007, la production d’amandes, qui a explosé en Californie, requiert un nombre toujours plus important de pollinisateurs. Un rythme que les abeilles états-uniennes ne peuvent tenir.

BOUM. Pour le meeting annuel de la Société américaine de géologie le 27 septembre 2016, Kelly Watson, professeur assistant de géosciences à l’Eastern Kentucky University et son étudiante Larissa Watkins, ont présenté les résultats de leur étude d’imagerie aérienne réalisée grâce au Programme National d’Imagerie de l’Agriculture (NAIP), en Californie. Entre 2007 et 2015, elles ont observé la superficie des terrains cultivés et se sont particulièrement penchées sur la culture d’amandes. La production de ce produit a connu un véritable boum depuis 2007 à cause d’une forte demande et d’une montée du prix des amandes. Or cette effervescence a des conséquences sur les abeilles pollinisatrices puisqu’elles sont importées chaque année dans la Central Valley pour féconder les fleurs d’amandiers.

Un marché florissant aux conséquences redoutables

Selon les auteurs, la consommation mondiale d’amandes a haussé de 200% depuis 2005 et les prix ont augmenté d’1 dollar par livre (soit 0,45 kg) pour atteindre un pic de 5 dollars la livre en 2014. Or la Californie répond à 80% de la demande mondiale d’amandes. Le boum de la production d’amandes est particulièrement visible sur les imageries aérienne : l’étude révèle qu’entre 2007 et 2014, la superficie des terrains d’amandiers a augmenté de 14%, or ces cultures ont pris la place de champs de maïs, de coton ou de tomates. Ces derniers utilisaient moins d’eau que les amandiers, ce qui a provoqué une augmentation annuelle de l’irrigation globale de 27% entre 2007 et 2014, malgré la sécheresse historique que connaît l’état. « Si vous regardez les terrains exploités, plus de 16.000 ont été classés comme terrains humides pour les amandes », s’alarme le professeur Watson.
« La prochaine chose que nous voulons pointer du doigt est ce que signifie l’augmentation de la culture d’amandes pour la demande de pollinisateurs », explique Watson. Les fleurs d’amandiers californiens sont presque toutes auto-incompatibles (elles ne peuvent pas se féconder toutes seules), elles ont donc besoin d’insectes pollinisateurs pour produire des amandes. La culture d’amandes est par conséquent dépendante de la pollinisation par les abeilles domestiques. Or la Californie ne possèdent pas assez d’abeilles, et les Etats-Unis encore moins. Alors comment permettre aux cultures de se développer ? Les apiculteurs semblent avoir trouvé un moyen de répondre à cette demande : ils louent leurs abeilles aux agriculteurs à travers tous les états. Ainsi 60% des abeilles "commerciales", soit 1.6 million de colonies d’abeilles états-uniennes, sont importées en Californie chaque année. Les Apis mellifera, abeilles domestiques européennes, visitent plus de 800.000 parcelles chaque année, de Sacramento à Los Angeles. Leur circuit débute en février avec les amandes californiennes pour finir en hiver en Floride avec le poivre brésilien.
DÉTRESSE. Le transport de ces insectes leur cause énormément de stress et les pics de chaleur affectent les reines. Les abeilles se restreignent à un régime de nectar d’amandiers au lieu de se délecter d’un mélange de fleurs aux protéines diverses. Elles sont potentiellement exposées aux pesticides, aux nuisibles, aux fongicides et autres produits chimiques qui affaiblissent leur système immunitaire. Les pollinisateurs deviennent les hôtes de virus qui les font voler plus lentement, agir de façon insensée ou mourir prématurément. « Si vous cherchez ce qui cause le déclin des abeilles, l’agriculture industrielle tient certainement un rôle majeur. » affirme Watson.
Certains cultivateurs tentent de trouver des alternatives à la pollinisation. Une espèce d’amandier, l’Independance, éviterait tous ces transports d’abeilles à travers les états. Il s’agit d’un croisement d’amandier et de pêcher auto-fertile, vendu exclusivement par Dave Wilson Nursery, le laboratoire qui a développé l'espèce. Mais qu’en est-il du rendement et de la qualité du fruit obtenu ?

jeudi 29 septembre 2016

Une dizaine de substances « préoccupantes » dans l’alimentation des jeunes enfants

C’est l’une des plus vastes enquêtes jamais réalisées sur le sujet. L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a publié, mercredi 28 septembre, une analyse des contaminants (métaux lourds, dioxines, pesticides…) présents dans l’alimentation-type des enfants de moins de trois ans. Après y avoir évalué la présence de plus de 500 contaminants, l’agence de Maisons-Alfort (Val-de-Marne) estime qu’une dizaine d’entre eux sont « préoccupants » et que les niveaux d’exposition actuels peuvent présenter des risques sanitaires.

L’Anses met en avant le plomb, l’arsenic inorganique, le nickel, l’acrylamide et les furanes (des composés se formant notamment lors des cuissons à haute température), les PCB (polychlorobiphényles), des dioxines ainsi que des mycotoxines – des substances produites par des champignons contaminant parfois les céréales. Les situations d’exposition à ces produits, tempère l’Anses, « ne sont pas systématiquement synonymes de survenue d’effets adverses ». Dans son avis, l’agence juge néanmoins « indispensable de mettre en place ou de renforcer des actions afin de diminuer l’exposition de la population infantile » à ces composés.

Travail de fourmi

Le détail des repas servis à plus de 700 enfants (non allaités) a été relevé plusieurs jours durant, de manière à construire un échantillon des repas-types. L’agence a ensuite reproduit les méthodes de préparation (dilution, cuisson…) de plus de 5 400 produits alimentaires avant d’en analyser la composition, de manière à estimer l’exposition des enfants aux toxiques décelés. Un travail de fourmi qui, avec la rédaction du volumineux rapport, aura duré près de six ans.
Selon l’agence, les deux tiers des enfants de moins de 4 mois ne sont pas exposés à des niveaux excessifs de ces substances préoccupantes. Mais ce taux chute à seulement 21 % chez les 13-36 mois. Dans cette tranche d’âge, plus de 40 % des enfants sont trop exposés à au moins deux composés problématiques.
La première recommandation ferme de l’Anses est de proscrire, pour les enfants de moins d’1 an, le lait courant en remplacement des préparations infantiles (laits pour nourrisson à reconstituer…). Outre les considérations nutritionnelles, le lait courant est en effet une source importante d’exposition à certains polluants organiques persistants, comme les PCB ou les dioxines. Dans cette classe d’âge, les enfants consommant du lait courant sont ainsi deux à six fois plus exposés à ces toxiques que ceux consommant des préparations infantiles.

Varier les espèces de poisson

Les PCB et les dioxines sont aussi présents dans le poisson, dont l’Anses recommande cependant la consommation deux fois par semaine, à condition de varier les espèces et les méthodes d’approvisionnement (pêche, élevage).
Autre substance pointée par l’Anses : le plomb. Ses principales sources d’exposition sont les légumes et l’eau mais son omniprésence dans l’environnement – héritage de l’essence plombée, aujourd’hui bannie – rend difficile son évitement. L’agence recommande ainsi de « varier le régime alimentaire des enfants afin qu’ils ne mangent pas systématiquement les aliments les plus contaminés ». Quant à l’arsenic inorganique, il est principalement présent dans les préparations infantiles, le riz, les petits pots préparés à base de légumes ou de poisson. Ces mêmes petits pots sont également critiqués pour des teneurs parfois excessives d’acrylamide ou de mycotoxines, également retrouvées dans les boissons lactées à base de céréales et les biscuits.

Une centaine de substances non évaluées

En définitive, l’Anses recommande de conduire des travaux de nature à « identifier clairement les sources de contamination au cours de l’ensemble de la chaîne de production » et d’améliorer les connaissances agronomiques. Elle suggère aussi de conduire une réflexion sur « l’utilité de la mise en œuvre d’une réglementation pour les contaminants non réglementés à ce jour (…) pour lesquels l’exposition est jugée préoccupante : acrylamide, furanes, nickel » et certaines mycotoxines.
Bien que très ambitieuse, l’analyse a ses limites. D’abord, avertit l’Anses, une centaine de substances rencontrées n’ont pas pu être évaluées du point de vue de leurs risques potentiels, faute de connaissances toxicologiques. C’est le cas de certains matériaux au contact des aliments (plastifiants, résines…), de perturbateurs hormonaux ou encore de pesticides. De plus, les effets potentiels des mélanges de molécules n’ont été pris en compte que dans un nombre limité de cas. Enfin, seule l’exposition alimentaire a été prise en compte. Or, dans certains cas, l’exposition par le biais de l’air ambiant ou des poussières domestiques, par exemple, peut être importante.

lundi 26 septembre 2016

En 2060, la pollution de l’air fera toujours plus de morts

L’OCDE prévoit une importante dégradation de la qualité de vie si rien n’est fait pour améliorer notre milieu ambiant et lutter contre les effets de la pollution de l’air.

PARTICULES. Quelles conséquences pour l’Humanité si les pouvoirs publics n’agissent pas pour améliorer la qualité de l’air ? L’OCDE a fait tourner ses modèles économiques pour tenter d’évaluer le coût de l’inaction. La qualité de l’air devrait en effet continuer de se dégrader du fait de la conjonction d’au moins deux facteurs : le grossissement des villes et une croissance économique toujours basée sur la combustion de charbon, de pétrole et de gaz. La situation actuelle n’est déjà guère enviable. Les teneurs en particules fines, en oxyde d’azote et en ozone au mieux stagnent dans les pays les plus développés réunis au sein du club OCDE, au pire explosent dans les pays en voie de développement et notamment chez les deux géants, l’Inde et la Chine. Selon les calculs de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 3 millions de personnes meurent tous les ans des effets de la pollution de l’air. En 2015, près de 19 milliards d’euros ont été consacrés à des soins de santé lié à la qualité de l’air et 1,2 milliard de journées de travail ont été perdues.

 Se projeter dans le futur n’est pas chose aisée. Les modélisateurs de l’OCDE ont ainsi renoncé à entrer dans leurs calculs les effets directs des oxydes d’azote faute de données fiables à l’échelle de la planète et les impacts sur les écosystèmes et les bâtiments n’ont pu également être monétisés. Si les résultats doivent être pris avec prudence (qui sait comment va évoluer l’économie dans les prochaines décennies ?), ils donnent cependant une idée des effets d’un air dégradé dans un demi-siècle. Ainsi, de trois à six millions de personnes devraient décéder à cette échéance d'avoir respiré un air vicié. Les pays les plus pollués comme la Chine et l’Inde sont les plus concernés auxquels il faut aussi ajouter les régions à la population vieillissante comme l’Europe de l’Est. D’après ces projections, les coûts des soins de santé induits par la pollution de l’air devraient atteindre plus de 150 milliards d’euros (huit fois plus qu’aujourd’hui) et 3,7 milliards de jours de travail seraient perdus.

Trois fois plus de morts en 2060

SOINS. La baisse de la productivité au travail, l’augmentation des dépenses de santé, les pertes dues à la diminution des rendements agricoles (des polluants comme l’ozone sont des oxydants des tissus végétaux) représenteront à l’horizon 2060 une charge équivalant à 1% du Produit intérieur brut (PIB) mondial. Ces pertes seront bien plus marquées en Chine avec une baisse de 2,6% du PIB et en Europe de l’ouest (-2%) et de l’est (-2,7%). Outre ces conséquences sur les biens marchands, l’étude s’est également penchée sur les sommes que les personnes sont prêtes à payer pour améliorer leur état de santé affecté par la qualité de l’air et réduire le risque de décès prématuré. Ces coûts estimés aujourd’hui à plus de 2600 milliards d’euros sont évalués en 2060 entre 16 000 et 22 000 milliards d’euros. Les coûts annuels associés à la douleur et à la maladie passeraient de 260 milliards d’euros à près de 2000 milliards d’euros. Rapporté à chaque habitant, cette dépense flambe de 450 euros aujourd’hui à 2500 euros par an en 2060.
L’OCDE presse donc les pays d’agir pour des raisons sanitaires autant qu’économiques. « D’importantes incertitudes demeurent dans l’évaluation des coûts en bien-être liés aux décès prématurés et aux maladies, reconnaît Angel Guria, secrétaire général de l’OCDE, mais il est certain que des millions de vies seront en danger et que la situation économique des pays empirera si les pouvoirs publics ne mettent pas en place des mesures plus ambitieuses ».

mardi 6 septembre 2016

Quand l’océan se meurt, la planète aussi

Au milieu du hall d’exposition du congrès de l’Union internationale pour la protection de la nature (UICN), qui se tient à Hawaï jusqu’au 10 septembre, trône une très grosse mappemonde de l’agence météorologique et océanique américaine (NOAA). Elle se taille un franc succès auprès du public en montrant en accéléré le réchauffement de l’océan, ainsi que l’augmentation de son taux de salinité depuis la fin du XXe siècle : la planète vire à l’écarlate.
Et la gigantesque masse océanique qui la couvre à 71 % – soit 360,6 millions de kilomètres carrés –, devrait encore gagner un à quatre degrés d’ici à 2100. Même la température de l’eau des grandes profondeurs est en train de s’élever et, près des côtes, le thermomètre grimpe 35 % plus vite que dans la haute mer depuis les années 1960.
« Les changements dans l’océan se font cinq fois plus vite que dans n’importe quel écosystème terrestre », annonce Dan Laffoley, vice-président de la Commission mondiale des aires protégées de l’UICN
Les scientifiques estiment que l’océan a absorbé 93 % du réchauffement dû à l’émission de gaz à effet de serre générés par les activités humaines depuis 1970. « Sans cela, il ferait 36 degrés Celsius de plus qu’actuellement sur la terre, ce serait invivable », traduit Carl Gustaf Lundin, directeur du programme marin de l’UICN. Or « 70 % de la biodiversité se trouve dans l’océan », rappelle-t-il. Ce rôle de tampon face aux changements climatiques a un coût élevé pour les écosystèmes marins, c’est ce que le réseau de défense de la nature montre dans une volumineuse compilation d’études scientifiques, qu’elle rend publique lundi 5 septembre. Quatre-vingts scientifiques originaires de douze pays ont contribué à cette somme – inédite par son ampleur. Le tableau est édifiant.

Migrations des organismes marins

« Les changements dans l’océan se font cinq fois plus vite que dans n’importe quel écosystème terrestre », annonce Dan Laffoley, vice-président de la Commission mondiale des aires protégées de l’UICN et l’un des principaux coauteurs. Des régions polaires jusqu’aux régions tropicales, des groupes entiers d’espèces, comme les méduses, les tortues et les oiseaux de mer, se sont mis à remonter de dix degrés de latitude vers les pôles.
Tous les organismes marins ont commencé à migrer : phytoplancton, algues, invertébrés, poissons, mais pas tous selon la même trajectoire. Non seulement le plancton, à la base de la chaîne alimentaire de la faune marine, change d’aires de répartition depuis cinquante ans, mais sa saisonnalité se modifie, et il devient plus petit par endroits. Note plus positive : il se diversifie dans les eaux froides.

Ces nouvelles donnes ont des effets « dramatiques », insistent les auteurs, sur la reproduction et la nutrition de nombre d’espèces. Le réchauffement a, par exemple, un effet dévastateur sur les tortues, dont six des sept espèces marines sont classées en danger d’extinction par l’UICN. Entre autres maux, il perturbe l’incubation des œufs, augmentant dangereusement le nombre de femelles, au point de compromettre la génération suivante.
Certains phénomènes sont connus : le blanchiment des coraux est un indicateur évident, repérable à l’œil nu, du réchauffement et de l’acidification de l’eau. La totalité d’entre eux devrait être affectée d’ici à 2050, alors qu’ils fournissent l’habitat d’un quart des espèces de poissons. Il est plus difficile de sensibiliser le public au sort des algues, bien que les scientifiques s’inquiètent tout autant de la dégradation accélérée des fonds côtiers. La destruction des forêts de laminaires fait perdre certains poissons et, pire encore, leur habitat, tout en favorisant les proliférations d’autres algues, ce qui réduit la quantité d’oxygène dans l’eau.

Impacts sur la santé humaine

Près des côtes, les changements vont avoir des impacts manifestes. Certaines populations y sont dépendantes des produits de la mer. La pêche et l’aquaculture fournissent environ 15 % de protéines animales à 4,3 milliards de personnes dans le monde. Or, sous l’effet de l’élévation des températures – à laquelle s’ajoutent les attaques de méduses et de divers pathogènes –, les élevages conchylicoles, de crustacés ou de saumon seront amenés à déménager. Quant aux pêcheurs côtiers, il y aura parmi eux des gagnants et des perdants. En Somalie, par exemple, particulièrement mal dotée, la pêche pourrait passer de 1,29 kg à 0,85 kg de poissons par personne et par an.

lundi 29 août 2016

En Russie, l’anthrax ressurgit avec le réchauffement climatique

Dans un épais rapport de 1 000 pages publié en 2014, les climatologues russes avaient glissé, au chapitre des conséquences du réchauffement global, le risque de l’apparition de l’anthrax, une bactérie potentiellement mortelle.
Ils ne savaient pas encore qu’à peine deux ans plus tard leurs craintes se révéleraient justifiées. Le 1er août, dans la péninsule de Yamal, tout au nord de la Russie, un garçon de 12 ans est mort de cette infection, connue aussi sous le nom de « maladie du charbon », et supposée disparue depuis des décennies.
« C’est la première fois qu’une épidémie d’anthrax apparaît en Russie depuis 1941 », affirme Alexandre Platonov, le directeur du laboratoire des infections naturelles à l’Institut d’épidémiologie de Moscou.
Et « logiquement », ajoute-t-il, « la vaccination a pris fin en 2007 » – le temps que les derniers programmes de prévention s’éteignent. Une grave erreur, pour certains. Cet été, 23 personnes ont aussi été contaminées, ainsi que 2 500 rennes. Envoyés sur place, 500 militaires ont reçu pour mission de brûler le plus vite possible les carcasses de ces animaux très répandus dans cette région arctique une fois et demie plus grande que la France.

jeudi 18 août 2016

Juillet 2016 : le mois le plus chaud jamais mesuré

Juillet 2016 a été le mois le plus chaud de l'histoire moderne, établissant un record depuis le début des relevés de températures a annoncé la l'Agence américaine océanique et atmosphérique (NOAA).

 "La température moyenne globale à la surface des terres et des océans pour juillet 2016 a été la plus chaude, tant pour le mois de juillet que pour n'importe quel mois dans les annales des relevés de températures de la NOAA, qui remontent à 1880", a indiqué l'Agence océanique et atmosphérique américaine. Le précédent record avait été établi en juillet 2015, ce mois étant traditionnellement le plus chaud de l'année sur Terre. C'est également la 15e fois consécutive qu'un record mensuel de température est battu, "la plus longue série de ce type en 137 ans", a ajouté la NOAA. En juillet la température moyenne globale au-dessus des terres et à la surface des océans a été de 16,67 degrés Celsius (°C), soit 0,87°C au-dessus de la moyenne du XXe siècle. Le record de juillet 2015 a été battu de 0,06°C.

 En mai 2016, le climatologue Ed Hawkins, chercheur à l'université de Reading avait publié avant l'été 2016 une spectaculaire animation montrant l'évolution des températures mois après mois depuis le début des mesures. Résultat : cette spectaculaire spirale du réchauffement climatique :

 Autre signe du réchauffement climatique, juillet a été le 379e mois consécutif avec des températures au-dessus de la moyenne du XXe siècle. Il faut remonter à décembre 1984 pour trouver trace d'une marque un peu inférieure à cette moyenne. Les températures ont été très hautes alors même que le phénomène du courant chaud du Pacifique El Nino est terminé, ont noté les scientifiques.

52,5°C au Koweït

Des températures supérieures à la moyenne, voire très supérieures, ont été relevées sur les six continents. Chacun d'entre eux pris individuellement a enregistré des températures parmi les plus hautes pour un mois de juillet. En Asie par exemple, le mois dernier a été le deuxième juillet le plus chaud de l'histoire, derrière 2010. La NOAA souligne aussi des épisodes plus chauds que d'habitude en Indonésie, en Asie du sud-est ou en Nouvelle-Zélande. Le Golfe persique a aussi connu des épisodes de chaleur particulièrement pénibles. "La température la plus haute enregistrée en juillet l'a été à Mitribah, au Koweït, avec une pointe à 52,5°C le 22 juillet", a encore mis en avant la NOAA. Autre exemple, Bahreïn a enregistré une température moyenne de 36°C sur tout le mois de juillet, soit 2,1°C de plus que la moyenne, égalant le record de 2012 pour son mois de juillet le plus chaud depuis le début des relevés de températures. Par comparaison, en Espagne la température moyenne a été de 25,5°C, mais le record reste pour ce pays celui de l'an dernier (26,5°C en juillet 2015).
 D'autres régions ont connu des températures plus conformes à la moyenne, voire un peu moins chaudes, comme les Etats-Unis, l'est du Canada, le sud de l'Amérique du Sud, le sud-ouest de l'Australie, le nord de la Russie, le Kazakhstan ou l'Inde. Pour juillet, l'étendue des glaces de l'Arctique a été 16,9% en-dessous de la moyenne établie entre 1981 et 2010, ce qui en fait la troisième plus petite étendue de glace pour un mois de juillet depuis le début des relevés en la matière, qui remontent à 1979. De manière globale, 2016 va très probablement devenir l'année la plus chaude de l'histoire moderne. Selon la NOAA les sept premiers mois ont été les plus chauds pour cette période, 1,03°C au-dessus de la moyenne du XXe siècle. Cette année est donc en passe de battre de 0,19°C le record tout juste établi l'année passée.

mercredi 17 août 2016

Les pesticides triplent la mortalité des abeilles sauvages

Les insecticides de la famille des néonicotinoïdes, les plus efficaces jamais synthétisés, tuent massivement abeilles et bourdons. Il n’y a plus désormais que les firmes agrochimiques pour le nier. Ou du moins pour sous-estimer le rôle de ces pesticides dans le déclin catastrophique des colonies d’insectes butineurs. Ces sociétés préfèrent le réduire à un facteur pathogène parmi d’autres : virus, monocultures réduisant et fragmentant leurs habitats, champignons, invasion de frelons, réchauffement climatique…

Il semble, au contraire, que les néonicotinoïdes multiplient par trois cette mortalité accélérée. C’est ce que défend une étude britannique publiée mardi 16 août par la revue Nature Communications et signée par sept chercheurs du centre pour l’écologie et l’hydrologie de Wallingford et de Fera Science Limited, un centre de recherche semi-privé sur l’environnement et l’alimentation sis à York (nord de l’Angleterre).
Voilà des années que les apiculteurs alertent sur l’impact des néonicotinoïdes, qu’ils lient à l’effondrement du nombre de leurs colonies d’abeilles, depuis que l’usage de ces produits chimiques s’est généralisé dans les campagnes occidentales, à partir de 1995.
De précédentes études scientifiques ont évalué leurs effets sublétaux et neurotoxiques sur les abeilles domestiques, en particulier. Elles ont montré notamment que celles-ci perdent leur sens de l’orientation, ou que les bourdons donnent naissance à 80 % de femelles en moins…

Des preuves solides

Mais tous ces travaux n’ont pas apporté de « preuves solides » de l’impact de ces pesticides sur la disparition des espèces sauvages dans la nature, avancent les auteurs de la présente étude.

A défaut d’établir un lien irréfutable de cause à effet, ces derniers estiment qu’ils illustrent cette fois de façon incontestable la relation entre produits chimiques et déclin des insectes en ayant croisé dix-huit années de données nationales, portant sur 62 des 250 espèces sauvages d’Angleterre, avec leur exposition aux champs de colza traités aux néonicotinoïdes. Cette échelle de temps paraît pertinente, écrivent-ils, pour observer les évolutions des populations d’insectes et, en parallèle, « les répercussions des changements historiques dans la gestion de l’agriculture ».
Les chercheurs ont eu recours aux relevés rigoureusement effectués au Royaume-Uni par des entomologistes volontaires, amateurs ou non, de la société nationale Bees, Wasps and Ants Recording, de 1994 à 2011. Ils en ont écarté les abeilles domestiques, car les apiculteurs les déplacent parfois en fonction des floraisons. Ils ont retenu les insectes sauvages repérés au moins cinq cents fois sur des parcelles d’un kilomètre carré ayant fait l’objet d’au moins deux recensements complets en dix-huit ans. Soit au final, une collection de 31 800 inventaires.

8,2 millions d’hectares de colza traités

Quant au colza, il a été choisi pour sa progression fulgurante. Cet oléagineux est désormais la principale culture traitée aux néonicotinoïdes et couvre ainsi 8,2 millions d’hectares en Europe.
L’année 2002 sert enfin de référence : c’est celle où s’est répandue outre-Manche cette famille de pesticides qui a pour caractéristique d’enrober la semence, puis de persister dans toute la plante, fleurs y compris, et même dans les sols. Les chercheurs ont comparé les courbes d’abondance que chaque espèce d’abeilles aurait dû suivre si ses effectifs avaient poursuivi la tendance dessinée avant 2002, avec les trajectoires réelles ultérieures.

Leurs modèles en ont déduit que, dans un premier temps, le colza fournit aux abeilles de quoi butiner, mais ce bienfait ne compense pas la toxicité des pesticides. Au contraire. « Nous estimons que, depuis 2002, l’usage de néonicotinoïdes est à lui seul responsable d’une perte supérieure à 20 % pour cinq espèces [Halicte tumulorum, Lasioglossum fulvicorne, L. malachurum, L. pauxillum et Osmia spinulosa] », affirment les auteurs. La même cause suscite un déclin de 10 % chez vingt-quatre espèces, de plus de 15 % pour onze autres, voire de 30 % chez les plus touchées.

Un déclin accéléré

Au total, les espèces sauvages friandes de colza traité aux néonicotinoïdes déclinent trois fois plus que les autres, observent-ils. Cependant, les non-butineuses ne sont pas non plus épargnées et semblent contaminées par d’autres fleurs ayant poussé à proximité de ces oléagineux.
Après bien des atermoiements, l’Union européenne a accepté, en 2013, d’interdire sur son territoire trois insecticides néonicotinoïdes sur certaines cultures. Officiellement décidé pour deux ans, le moratoire est encore en vigueur aujourd’hui.
En France, la nouvelle loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, adoptée le 20 juillet, prévoit de tous les bannir au 1er septembre 2018 sur l’ensemble des terres agricoles… mais avec de possibles dérogations jusqu’en 2020.

mardi 16 août 2016

Thiaclopride : la Commission européenne augmente la limite maximale de résidus dans le miel

Dans un règlement paru au Journal officiel de l'Union européenne, la Commission autorise l'augmentation de la limite maximale de résidus (LMR) à ne pas dépasser dans le miel et les produits de l'apiculture pour un néonicotïnoide : le thiaclopride. La LMR passe de 0,05 mg/kg à 0,2 mg/kg.
Cette modification découle d'une demande de l'Allemagne. Cette dernière souhaitait obtenir l'autorisation d'utilisation sur le colza d'un produit phytopharmaceutique contenant du thiaclopride. Pour tenir compte des résidus qui pourraient en conséquence se retrouver dans le miel, elle a alors proposé d'augmenter la LMR actuelle. L'Autorité européenne de sécurité des aliments a donné son feu vert en février dernier.
"L'Autorité a conclu que toutes les exigences en matière de données étaient remplies et que d'après une évaluation de l'exposition des consommateurs réalisée à partir de vingt-sept groupes de consommateurs européens spécifiques, la modification de LMR sollicitée par le demandeur était acceptable au regard de la sécurité des consommateurs, pointe le règlement. Un risque de dépassement de la dose journalière admissible ou de la dose aiguë de référence n'a été démontré ni en cas d'exposition tout au long de la vie résultant de la consommation de toutes les denrées alimentaires pouvant contenir cette substance ni en cas d'exposition à court terme liée à une consommation élevée du produit concerné".
L'Union nationale de l'apiculture française (Unaf) en février 2014 avait quant à elle dénoncé la toxicité de ce néonicotinoïde pour les abeilles.
Le règlement entrera en vigueur le 11 août 2016.

mardi 31 mai 2016

L'utilisation des pesticides néonicotinoïdes ne faiblit pas

Les données du ministère de l'Agriculture transmises à l'Union des apiculteurs de France (Unaf) à la demande de la Commission d'accès aux documents administratifs (Cada) le démontrent : l'utilisation des pesticides néonicotinoïdes ne faiblit pas. En 2014, 508 tonnes ont été vendues en France contre 388 tonnes en 2013 soit une hausse de 31% en un an. Entre 2012 et 2013, l'utilisation était restée stable.
Pour l'association d'apiculteurs, cette tendance démontre "l'inefficacité des interdictions partielles" prononcées en décembre 2013 par l'Union européenne. Sur les sept substances autorisées, trois font en effet l'objet d'une interdiction pour certains usages : l'imidaclopride, la clothianidine et le thiaméthoxam. Entre 2013 et 2014, l'utilisation de la clothianidine et du thiaméthoxam a baissé de plus de 76%. Mais les agriculteurs se sont reportés sur le thiaclopride dont les ventes ont triplé sur la même période. "Les maïs Cruiser (thiaméthoxam) et Cheyenne (clothianidine) ont été interdits et remplacés par le maïs Sonido (thiaclopride)", explique l'Unaf.
Le boom de l'imidaclopride
Sur la même période, les ventes d'imidaclopride ont quant à elles augmenté de 36% malgré l'interdiction de son utilisation sur certaines cultures. Depuis 2011, l'imidaclopride séduit de plus en plus avec des ventes multipliées par plus de six. En 2013, cette molécule a d'ailleurs fait son apparition pour la première fois dans le top 15 des pesticides les plus détectés dans les cours d'eau français.
Pour Gilles Lanio, président de l'Unaf, "C'est gravissime. Comment espérer retrouver des abeilles en bonne santé dans ces conditions ? (…) Il faut donc se rendre à l'évidence et interdire totalement et définitivement ces produits. Il faut faire cesser la substitution d'une molécule à une autre et retourner à des pratiques agronomiques".
L'association mise beaucoup sur la loi biodiversité qui prévoit l'interdiction de ces substances. Avec l'échec des négociations entre sénateurs et députés, c'est l'Assemblée nationale qui aura le dernier mot. Pour l'instant, l'interdiction est prévue pour le 1er septembre 2018 mais rien ne dit que l'Assemblée restera sur cette disposition tant le sujet divise même au sein de la majorité.

Hécatombe de coraux de la Grande barrière en Australie

Selon une nouvelle étude, 35% d'une grande partie des coraux australiens sont morts ou à l'agonie. La cause ? Un fort phénomène de blanchissement, lié au réchauffement des océans.

DÉPRIMANT. Pollutions diverses, acidification, algues et autres espèces invasives : les coraux n'ont vraiment pas la vie facile, comme le démontrent de nouveaux chiffres. D'après des scientifiques Australiens, au moins 35% des coraux du nord et du centre de la Grande barrière de corail Australienne sont morts ou à l'agonie, sous l'effet d'un épisode de blanchissement d'une rare gravité. Le professeur Terry Hughes, expert des récifs coralliens à l'Université James Cook de Townsville, dans le Queensland (nord-est de l'Australie), a précisé que le réchauffement climatique était probablement le responsable de ces ravages sur l'un des sites les plus emblématiques de l'Australie. Cette évaluation est le résultat de plusieurs mois de surveillance aérienne et sous-marine : "Nous avons découvert qu'en moyenne, 35% des coraux sont morts ou en train de mourir sur 84 récifs sur les sections centre et nord de la Grande barrière, entre Townsville et la Papouasie-Nouvelle-Guinée, a déclaré le chercheur. C'est la troisième fois en 18 ans que la Grande barrière de corail traverse un épisode grave de blanchissement lié au réchauffement climatique, et l'épisode actuel est beaucoup plus extrême que ce que nous avions mesuré auparavant".

Réchauffement = blanchissement = mort

Phénomène de dépérissement, le blanchissement se traduit par une décoloration des coraux. Il est effectivement provoqué par la hausse de la température de l'eau, qui entraîne l'expulsion des algues symbiotiques qui donnent au corail sa couleur et ses nutriments. Les récifs peuvent s'en remettre si l'eau refroidit, mais ils peuvent aussi mourir si le phénomène persiste. Il faut compter une décennie pour que la couverture corallienne se remette, "mais cela prendra beaucoup plus de temps pour retrouver les plus grands et plus anciens coraux qui sont morts", ajoutent les scientifiques. Outre le réchauffement climatique, la Grande barrière est aussi menacée par la prolifération des acanthasters et des échinodermes (de la même famille que les étoiles de mer) envahissant ce qui reste des coraux.
CONTROVERSE. Sur son site Internet, le Centre ARC pour les études sur les récifs coralliens publie des photographies comparatives montrant le même récif, complètement blanchi en février 2016, puis totalement colonisé et disparu sous des algues deux mois plus tard. Le site de 345.000 kilomètres carrés avait d'ailleurs évité de justesse en 2015 d'être placé par l'Unesco sur sa liste des sites en péril. Ainsi, un porte-parole du ministre de l'Environnement Greg Hunt, avait assuré mi-mai 2016 que le gouvernement allait tout faire pour protéger le site. Il a cependant été révélé il y a peu que le ministère Australien était intervenu pour obtenir que toutes les références à l'Australie, y compris à la Grande barrière de corail, soient retirées d'un rapport de l'ONU sur les ravages mondiaux du réchauffement climatique sur les sites au Patrimoine.

vendredi 27 mai 2016

L’utilisation des insecticides « tueurs d’abeilles » est toujours en forte augmentation

Les apiculteurs français en sont tout abasourdis : le moratoire européen sur certains usages des néonicotinoïdes semble jusqu’ici avoir été inopérant. Depuis sa mise en place en 2013, l’utilisation de ces insecticides, mis en cause dans l’effondrement du nombre d’abeilles et de pollinisateurs sauvages (bourdons, papillons, etc.), a même explosé. C’est le principal enseignement des statistiques obtenues, jeudi 26 mai, par l’Union nationale de l’apiculture française (UNAF), qui a saisi la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) contre le ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.

Selon ces données, les tonnages des cinq principaux « tueurs d’abeilles » vendus en France (acétamipride, clothianidine, thiaméthoxame, imidaclopride, thiaclopride) sont passés de 387 tonnes, en 2013, à 508 tonnes, en 2014. Soit une augmentation de 31 % en un an, malgré le moratoire. Quant aux données 2015, elles ne sont pas disponibles. « Nous avons écrit par deux fois à la direction générale de l’alimentation [au ministère de l’agriculture] pour avoir accès à ces informations, dit-on à l’UNAF. Sans réponse, nous avons saisi la CADA en février, qui vient de nous donner raison. »

« Contourner les interdictions »

Certaines molécules soumises à des restrictions par le moratoire imposé par Bruxelles en 2013 voient bien leur tonnage baisser en 2014, mais d’autres augmentent fortement. L’imidaclopride, l’une des molécules les plus toxiques pour l’abeille domestique, bondit de 36 % malgré le moratoire.
Au ministère, on relativise cette hausse, expliquant que « sur des molécules dont le tonnage total est faible, une petite augmentation peut conduire à des hausses de pourcentages qui peuvent sembler élevées ». En outre, ajoute-t-on en substance Rue de Varenne, ce n’est pas le tonnage qui permet d’évaluer l’intensité du recours aux pesticides, mais le « nombre de doses unités » (ou NODU), qui tient compte du tonnage des substances, mais aussi de leur activité chimique (certaines sont plus efficaces que d’autres) et de l’étendue des surfaces traitées.
Le tonnage des néonicotinoïdes aurait-il pu augmenter mais le fameux NODU baisser ? « Le NODU est surtout utile pour comparer l’utilisation de molécules dont l’activité est différente, dit François Veillerette, porte-parole de l’association Génération futures. Lorsqu’on suit une même substance, ou une même famille de substances, pour une même catégorie d’usages, les tonnages ne peuvent pas augmenter sans que le NODU n’augmente lui aussi. » Gilles Lanio, le président de l’UNAF, ne croit guère, lui non plus, que l’augmentation du tonnage des « néonics » puisse être associée à une baisse de leur utilisation : « Il y a des moyens pour contourner les interdictions de certains usages des néonicotinoïdes », dit-il.
« L’écart entre la réalité et le discours du ministre de l’agriculture [Stéphane Le Foll], qui se pose en défenseur des abeilles, est choquant, ajoute M. Lanio. Quand nous sommes reçus au ministère, on nous dit que les agriculteurs font de grands efforts et que les mortalités d’abeilles proviennent aussi de nos pratiques. Les chiffres montrent que c’est complètement faux. Quant à la transparence, elle n’est pas là, malgré les promesses. »

Des demandes non satisfaites

Car si l’UNAF a obtenu la transmission des chiffres détaillés de l’évolution du tonnage de chaque molécule, ses autres demandes n’ont pas été satisfaites. L’association a ainsi demandé le détail des traitements de semences par type de culture, et les superficies concernées. En vain. « Toutes nos demandes ont reçu un avis favorable de la CADA, mais celui-ci n’étant que consultatif, nous n’avons pas obtenu ces données », dit-on à l’UNAF. Au ministère, on répond que la publication de ces informations ne peut se faire qu’après un long travail, pour s’assurer que celles-ci ne trahissent aucun secret commercial des acteurs de la filière.
« Si nous n’obtenons pas l’information, ainsi que toutes celles qui ne nous ont pas été transmises, nous saisirons le tribunal administratif », dit-on à l’UNAF
Ce n’est pourtant pas tout. L’UNAF demandait aussi au ministère de lui transmettre les documents attestant de la position de la France, au niveau européen, lors des comités techniques des 27 juillet et 18 novembre 2015, au cours desquels deux nouveaux insecticides apparentés aux néonicotinoïdes (le sulfoxaflor et le flupyradifurone) ont été autorisés en Europe. La France a-t-elle voté pour ou contre l’autorisation de ces nouvelles molécules ? L’information est confidentielle. Sa divulgation, ont expliqué sans rire les services du ministère de l’agriculture à la CADA, « porterait atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France ». La CADA n’y a cru que moyennement et a donné un avis positif à la publication de cette information. « Si nous ne l’obtenons pas, ainsi que toutes celles qui ne nous ont pas été transmises, nous saisirons le tribunal administratif », dit-on à l’UNAF.

Une autre dispute sur les néonicotinoïdes est en cours, cette fois entre l’Assemblée nationale et le Sénat. En effet, lors de l’examen en deuxième lecture du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, la Chambre haute a défait la mesure d’interdiction totale de tous les néonicotinoïdes à partir de 2018, qu’avaient adoptée les députés. « Mercredi [25 mai], la commission mixte paritaire a échoué à concilier les deux positions, explique Delphine Batho, députée (PS) des Deux-Sèvres, coauteure de l’amendement sur les néonicotinoïdes. Le texte va donc revenir les 7 et 8 juin à l’Assemblée, en commission du développement durable. »
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/planete/article/2016/05/27/les-insecticides-tueurs-d-abeilles-en-forte-augmentation_4927380_3244.html#xY0gumWmqUIbq5Vm.99

mardi 3 mai 2016

Le changement climatique coûtera 2.000 milliards $ par an sur la productivité en 2030

En réduisant la productivité du travail et en affectant la santé des travailleurs, la hausse des températures liée au changement climatique pourrait coûter jusqu'à 2.000 milliards de dollars par an à l'horizon 2030, selon une étude publiée le 28 avril par l'Organisation internationale du travail (OIT), le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Climate Vulnerable Forum.
Les pertes estimées impliquent des "conséquences négatives d'une échelle similaire à la production économique, ou le PIB", pour un large éventail de pays en développement, dont l'Inde, l'Indonésie et le Nigéria, prévient l'étude. Plus d'un milliard de travailleurs sont déjà confrontés à des chaleurs excessives. Les régions les plus touchées incluent le sud des Etats-Unis, l'Amérique centrale et les Caraïbes, l'Afrique du Nord et de l'Ouest, l'Asie du Sud et du Sud-est.
Le 22 avril dernier, 175 pays ont signé l'accord sur le climat conclu à Paris (COP 21) en décembre dernier, visant à limiter la hausse de température "bien en deçà de 2°C" par rapport aux niveaux pré-industriels. Toutefois, même en limitant la hausse des températures à 1,5°C, les principales régions "feraient face à presque un mois entier de chaleur extrême, ajoutée chaque année d'ici 2030 (2010-2030)". Les pays les plus vulnérables pourraient perdre "10 à 15% des heures travaillées par an", alerte l'étude.

vendredi 15 avril 2016

Transition écologique : la mise en œuvre de la stratégie nationale est préoccupante

La mise en œuvre de la stratégie nationale de transition écologique vers un développement durable (SNTEDD) pour la période 2015-2020 est "préoccupante sur les enjeux écologiques majeurs (…) tels que le changement climatique, la perte accélérée de biodiversité, la raréfaction des ressources et la multiplication des risques sanitaires environnementaux". Le premier bilan officiel, publié le 11 avril, est qualifié de "contrasté" par le commissariat général au développement durable (CGDD) du ministère de l'Environnement. "Les indicateurs relatifs aux axes montrent que certaines bonnes pratiques émergent", mais il faudra suivre leur évolution sur les prochaines années pour "estimer dans quelle mesure la poursuite ou l'accélération des bonnes pratiques émergentes se traduit par une évolution positive".
Adoptée en février 2015, la SNTEDD fixe le cap de la France en matière de développement durable pour les années 2015 à 2020 et définit les orientations de la transition écologique vers une société plus sobre. Elle identifie quatre enjeux majeurs (le dérèglement climatique, la perte de biodiversité, la raréfaction des ressources et les risques sanitaires environnementaux) et retient neuf axes transversaux stratégiques qui regroupent les priorités d'actions. Trente-neuf indicateurs permettent son suivi annuel.
Plus de 90% des indicateurs ne sont pas satisfaisants
Pour évaluer les progrès de la transition écologique française, les services du ministère de l'Environnement ont comparé le niveau atteint par les "indicateurs essentiels" de suivi de la stratégie nationale avec l'objectif chiffré règlementaire (lorsqu'il existe) ou avec l'évolution inscrite dans la SNTEDD. Le bilan global est sans appel. "Plus de 90% des indicateurs reflètent un état non satisfaisant, dont plus de la moitié un mauvais état", explique le CGDD, précisant que "sur 21 indicateurs, 7% sont en vert, 36% en orange et 57% en rouge". Le document présente un tableau détaillé de ces indicateurs.
La situation la plus grave, selon le bilan, concerne la biodiversité, tous les indicateurs étant au rouge. L'artificialisation des sols a progressé de 1,4% par an en moyenne entre 2006 et 2014, atteignant 51.043 km2, soit 9,3% du territoire national. Autre exemple, la consommation de produits phytosanitaires a progressé de 5% en 2011-2013 par rapport à 2009-2011, alors que la France s'est fixé pour objectif de la réduire, si possible, de 50% entre 2008 et 2018. Enfin, seulement 22% des habitats naturels d'intérêt communautaire sont en bon état de conservation.
 Premiers impacts du dérèglement climatique
Quatre indicateurs sont en rouge, sur les sept relatifs au changement climatique. Seule la baisse de 11% des émissions de gaz à effet de serre sur le territoire national entre 1990 et 2013 est satisfaisante. La légère progression de 1,1% entre 1990 et 2012 de l'empreinte carbone de la demande finale intérieure, qui tient compte des émissions liées aux importations, est qualifiée de "moyenne". Elle "a augmenté significativement de 1995 à 2007 avant de repartir à la baisse", avance le CGDD pour justifier ce jugement mitigé. Quant aux conséquences climatiques, elles commencent à se faire sentir avec une hausse de la température moyenne française de 1,9°C par rapport à la période de référence 1961-1990 et une moyenne de cinq évènements naturels très graves pour les années 2000, contre deux pour les années 80 et 90. Compte tenu de la hausse du nombre de logements (+7% entre 1999 et 2006) et de la population (+1%) exposés à des risques de submersion marine, le montant des indemnisations versées par les assurances au titre des catastrophes naturelles est en hausse.
Avec un indicateur en vert, quatre en orange et deux en rouge, l'enjeu "raréfaction des ressources" est "globalement moyen". L'état chimique, et surtout quantitatif, des eaux souterraines est jugé bon. L'évolution des consommations intérieures de matières (en baisse de 5,9% entre 1992 et 2012, à 12 tonnes par habitant) et d'énergies fossiles (en baisse de 22% entre 1973 et 2013, mais stable depuis 2 ans) est jugée moyenne. Enfin, même constat mitigé pour les risques sanitaires environnementaux. L'évolution des indices de pollution de l'air en milieu urbain et de pollution des cours d'eau est moyenne, mais celle de l'indice de pollution des eaux souterraines par les nitrates est mauvaise.
Des tendances favorables à court terme
Concernant les neuf axes transversaux, le CGDD a comparé l'évolution récente (trois ans) des indicateurs à la tendance sur longue période. Il a aussi évalué la possibilité d'atteindre les objectifs de long terme, si la tendance actuelle se poursuit. De bonnes pratiques se distinguent : réduction des inégalités, mutation des activités économiques, connaissances et innovation, formation ou sensibilisation, mobilisation des acteurs et développement de territoires durables et résilients. En revanche, la situation est "plus nuancée" pour l'engagement vers l'économie circulaire et sobre en carbone, ainsi que l'invention de nouveaux modèles économiques et financiers. Enfin, la promotion du développement durable à l'international "n'est pas bonne". "La part de l'aide publique au développement dans le revenu national brut est en baisse depuis 2010 et en-deçà de l'engagement pris auprès des Nations unies pour 2015", explique le rapport.
Globalement, le CGDD juge que les tendances de la plupart des indicateurs sont favorables sur longue et sur courte période. "Treize indicateurs sur les quinze qualifiés sont en progrès sur le long terme et onze indicateurs sur seize qualifiés pour la période récente", explique le CGDD, soulignant que "deux points de vigilance seulement ressortent en tendance de long terme : la consommation d'énergie finale a augmenté depuis 1990 au lieu de baisser ; la part des recettes fiscales environnementales dans les prélèvements obligatoires est plus faible en 2014 qu'en 2000". A plus court terme, ces deux indicateurs s'améliorent. La consommation d'énergie finale a baissé en 2009 et s'est stabilisée depuis. Quant à la part des recettes fiscales environnementales dans les prélèvements obligatoires, la baisse a été enrayée depuis 2009.
Trois des cinq indicateurs dotés de cibles réglementaires chiffrées sont en situation favorable si les évolutions se prolongent. Il s'agit du taux de recyclage des déchets ménagers, du nombre de projets d'éducation au développement durable dans les écoles et de la progression du montant de l'aide publique au développement pour la biodiversité.

mardi 22 mars 2016

En février 2016, des températures sans précédent

INCROYABLE. Les annonces de records de température s'enchaînent les unes après les autres. La dernière en date concerne le mois de février 2016, et elle est assez terrifiante. Non seulement il s'agit du mois le plus chaud depuis 136 ans que l'on mesure les températures selon l'Institut Goddard de la Nasa, mais en plus l'écart des températures à la normale n'a jamais été aussi élevé. En effet, pour la première fois, l'écart à la moyenne des températures mondiales enregistrées entre 1951 et 1980 atteint 1,35°C. Soit un demi degré de plus que le précédent record de température, atteint en février 1998. L'écart à la moyenne n'était alors "que" de 0,88 °C. Sur son site, la Nasa précise que ces températures anormalement élevées, mesurées dans près de 6300 stations de mesure partout dans le monde, ainsi que par des navires et des bouées instrumentées, ont été constatées presque partout. L'Asie, l'Amérique du Nord et l'Arctique sont les zones dans lesquelles il a fait le plus chaud. Seul le Kamtchatka et une petite portion de l'Asie du sud est ont connu des températures plus fraîches que de coutume.

Les grands dauphins experts de la cuisine aux fruits de mer

La préparation des aliments n’est pas l’apanage de l’Homme. Il existe de nombreux comportements dans la nature à même d’entrer dans cette catégorie. Le raton laveur, par exemple, s’en va tremper sa nourriture dans un point d’eau pour la ramollir. La loutre fait usage d’outils, deux pierres qui servent de marteau et d’enclume, pour casser ses coquillages. Encore plus subtils, certain corbeaux lâchent leurs noix les plus dures sur des passages piétons. Ils profitent ensuite du trafic pour briser la coquille et retournent consommer ce qui reste une fois le feu passé au rouge. Au court d'un récente expérience, les chimpanzés avaient manifestés un goût prononcé pour les aliments cuits ainsi que la capacité à les préparer. Mais d’après une étude publiée dans l’Australian Journal of Zoology, les dauphins portent ce genre de pratique à un tout autre niveau. Une fois n’est pas coutume, ce n’est pas tant en terme d’ingéniosité que les cétacés impressionnent mais plutôt de complexité. Pour consommer des seiches géantes, les dauphins passent par pas moins de 6 étapes. "Dans un premier temps, ils capturent la seiche et la ramènent en surface (1), ils séparent ensuite la tête du reste du corps (2) puis vident l’animal de son encre (3).", détaillent les chercheurs. "Après avoir positionné leurs rostres sur la partie inférieure de la proie (4), ils arrachent l’os de seiche (5) et finissent par manger la chaire restante à la surface (6)." Une véritable recette de cuisine.
Un comportement dont la complexité est encore renforcée lorsque qu’on considère qu’il est propre à une seule et même population. En effet, ces dauphins ont été observés au large de Bunbury, au sud-ouest de l’Australie, mais de précédentes études mettent en évidence des techniques différentes dans d'autres endroits. Les auteurs citent notamment le cas de groupes qui ne consomment que la tête de la seiche. D’autres la plaquent sur le fond pour la frapper de leurs rostres (retirant ainsi l’encre) avant de la traîner sur le sable pour éjecter l’os. Différents procédés liés à des populations éloignées géographiquement. Difficile de ne pas y voir un nouvel exemple du phénomène de transmission déjà observé chez les dauphins. En effet, les scientifiques étaient remonté à une unique ancêtre commune pour expliquer l’apparition d’une technique singulière chez les femelles d’un groupe, consistant à porter une éponge sur son rostre pour le protéger.

vendredi 26 février 2016

Avec la disparition des pollinisateurs, c'est l'alimentation de millions de personnes qui est menacée

Le déclin des insectes, oiseaux et chauve-souris pollinisateurs menace une partie de la production agricole mondiale... et les populations humaines qui en dépendent.

 MENACE. Les pollinisateurs, insectes ou oiseaux, sont en déclin et certaines espèces sont même en danger d'extinction, ce qui menace une partie de la production agricole mondiale, a prévenu vendredi 26 février 2016 un groupe de scientifiques mandatés par l'ONU pour évaluer le recul de la biodiversité. La Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES en anglais) dresse ce constat inquiétant dans son premier rapport, publié le même vendredi à Kuala Lumpur, et dans un résumé destiné à éclairer les choix des politiques pour enrayer une spirale préjudiciable à l'alimentation des populations. "Un nombre croissant de pollinisateurs sont menacés d'extinction, au niveau mondial, par plusieurs facteurs, dont nombreux sont dus à l'homme, ce qui met en danger les moyens d'existence de millions de personnes et des centaines de milliards de dollars de production agricole", estime le groupe d'experts dans un communiqué.

 Moins de fruits, légumes et graines  

Selon l'IPBES, 5 à 8 % de la production agricole mondiale, soit entre 235 et 577 milliards de dollars, sont directement dépendants de l'action des pollinisateurs sur les cultures (céréales, fruits, etc.). "Sans les pollinisateurs, beaucoup d'entre nous ne pourraient plus être en mesure de consommer du café, du chocolat ou des pommes, parmi bien d'autres aliments de notre quotidien", a commenté Simon Potts, vice-président de l'IPBES et professeur à l'Université de Reading (Royaume-Uni). Il existe plus de 20.000 espèces de pollinisateurs, qu'ils soient sauvages comme les papillons ou les bourdons, ou domestiques, comme l'abeille d'Europe (Apis mellifera) qui fabrique du miel. D'une manière plus générale, au moins trois quarts des cultures mondiales (céréales, fruits, légumes, oléagineux, etc.) dépendent en partie des pollinisateurs pour la croissance des plants, les rendements ou la qualité, notent également les chercheurs associés à la plus vaste expertise jamais réalisée sur le sujet. Contrairement au blé ou au riz, la plupart des fruits et légumes, des oléagineux et certaines céréales, qui constituent "des sources importantes de vitamines et de minéraux", sont des cultures dépendantes de la pollinisation. D'où, la mise en garde des scientifiques face à "une possible hausse des risques de malnutrition".

L'Europe fortement touchée 

Aujourd'hui, 16 % des pollinisateurs vertébrés (oiseaux, chauve-souris) sont menacés de disparition, un chiffre qui va jusqu'à 30 % pour les espèces insulaires, affirment-ils. Pour les insectes, qui constituent le gros du contingent des pollinisateurs, il n'y a pas d'évaluation à l'échelle mondiale, faute de données disponibles partout. Mais "des estimations locales et régionales font état de menaces très élevées, en particulier pour les abeilles et les papillons, avec souvent plus de 40 % des espèces d'invertébrés menacées localement", précisent les scientifiques. L'Amérique du Nord et l'Europe de l'Ouest sont particulièrement touchées par le déclin des pollinisateurs sauvages. En Europe, les populations d'abeilles - sauvages comme domestiques - et de papillons sont en chute libre (respectivement moins 37 % et moins 31 %) et 9 % de ces animaux sont menacés d'extinction. Malgré des données incomplètes pour l'Amérique latine, l'Asie et l'Afrique, les scientifiques estiment que les mêmes tendances sont à l'œuvre dans ces zones.

L'IPBES : le GIEC de la biodiversité

"Le déclin des pollinisateurs sauvages est principalement dû à des changements dans l'utilisation des terres, aux pratiques de l'agriculture intensive et à l'utilisation de pesticides, aux espèces invasives, à des agents pathogènes et au changement climatique", résume Robert Watson, l'un des vice-présidents de l'IPBES. Le groupe d'experts, qui n'émet pas de strictes recommandations, rappelle les moyens, déjà largement connus, pour créer un monde plus favorable aux pollinisateurs : une présence accrue de fleurs sauvages à proximité des cultures, une baisse de l'utilisation des pesticides et un meilleur contrôle des parasites. Ce premier rapport a été rédigé par près de 80 experts et commenté par des centaines d'autres. À l'instar du Groupe d'experts intergouvernemental sur le climat (Giec), l'IPBES est désormais chargé de produire des rapports faisant la synthèse des connaissances sur le déclin des espèces animales et végétales et leurs écosystèmes, qui constituent la biodiversité mondiale.

mercredi 24 février 2016

Océans : la montée des eaux n'a jamais été aussi rapide depuis 3.000 ans

Le niveau des océans monte plus rapidement depuis le siècle dernier que durant les trois derniers millénaires à cause du changement climatique, selon une étude.

 FONTE. Entre 1900 et 2000, les océans et les mers de la planète ont monté d'environ 14 centimètres sous l'effet de la fonte des glaces, notamment dans l'Arctique, ont relevé les chercheurs, dont les travaux sont publiés dans les Comptes rendus de l'Académie américaine des sciences (PNAS).

Un siècle extraordinaire

Ces climatologues ont estimé que sans la hausse de la température planétaire observée depuis le début de l'ère industrielle, la montée des océans aurait été moitié moindre au XXe siècle. Le siècle dernier "a été extraordinaire comparé aux trois derniers millénaires et la montée des océans s'est même accélérée ces 20 dernières années", a souligné Robert Kopp, professeur adjoint au département des sciences de la Terre de l'université Rutgers (New Jersey, est).

D'après cette étude, qui s'est appuyée sur une nouvelle approche statistique mise au point à l'université d'Harvard (Massachusetts), les océans ont baissé d'environ huit centimètres entre l'an mille et 1400, période marquée par un refroidissement planétaire de 0,2 degrés Celsius. "C'est frappant de voir une telle variation du niveau des océans liée à un aussi léger coup de froid du globe", a pointé le professeur Kopp. Actuellement, la température mondiale moyenne est un degré Celsius plus élevée qu'à la fin du XIXe siècle, a-t-il ajouté.
Pour déterminer l'évolution du niveau des océans pendant les trois derniers millénaires, les scientifiques ont compilé de nouvelles données géologiques, indicateurs de l'élévation des eaux comme les marais et les récifs coralliens, et des sites archéologiques.

Les glaces fondent plus vite

Ils ont également utilisé des relevés sur les marées à 66 endroits du globe au cours des 300 dernières années. Ces estimations précises de la variation du niveau des océans au cours des 30 derniers siècles permet de faire des projections plus exactes, a noté Andrew Kemp, professeur des sciences océaniques et de la Terre à l'université Tufts. Les chercheurs ont ainsi estimé que le niveau des océans allait "très probablement monter de 51 cm à 1,3 mètre durant ce siècle si le monde continue à dépendre dans une aussi large mesure des énergies fossiles".

COP 21. Le 12 décembre 2015, 195 pays ont approuvé l'accord de Paris qui prévoit notamment de contenir la hausse des températures à deux degrés par rapport à l'ère pré-industrielle. Si ces engagements conduisaient à une élimination progressive du charbon et des hydrocarbures, cette augmentation pourrait peut-être n'atteindre qu'entre 24 et 60 cm, selon cette étude. "Ces nouvelles données sur le niveau des océans confirment une fois de plus combien cette période moderne de réchauffement est inhabituelle car elle est due à nos gaz à effet de serre", a souligné Stefan Rahmstorf, professeur d'océanographie au Potsdam Institute de recherche sur l'impact du climat, en Allemagne. "Elles montrent que l'impact le plus dangereux de la montée des températures est l'élévation des océans, qui est bien engagée", a-t-il pointé.
"Les glaces fondent plus vite quand les températures montent, c'est de la physique élémentaire", avait-il ironisé par ailleurs. Selon un rapport distinct publié le 22 février 2016, sans le réchauffement de la planète depuis le début de l'ère industrielle et ses effets sur l'élévation des océans, plus de la moitié des 8.000 inondations sur la côte Est des Etats-Unis depuis 1950 ne se seraient pas produites.
Des zones côtières habitées qui se trouvent au niveau de la mer ou en-dessous sont particulièrement affectées, notamment la région de la baie de Chesapeake, sur la côte est des Etats-Unis, ont expliqué les auteurs de cette étude.

FRUITS ET LÉGUMES: LA PRÉSENCE DE "POLLUANTS ÉTERNELS" AUGMENTE DE 220% EN EUROPE

  https://www.bfmtv.com/economie/consommation/fruits-et-legumes-la-presence-de-polluants-eternels-augmente-de-220-en-europe_AD-202402270162....