C’est une nouvelle illustration de la colossale pression que l’humain exerce sur les océans. La pêche industrielle exploite au moins 55 % de la surface des mers dans le monde – soit plus de quatre fois la superficie occupée par l’agriculture sur terre. Voilà les conclusions d’une vaste étude, publiée dans Science vendredi 23 février, qui passe au crible, avec un degré de précision inédit, l’ampleur des prises de poissons partout sur la planète, jusqu’aux déplacements du moindre navire et à ses activités heure par heure. Elle fournit une carte interactive, accessible au grand public, de l’empreinte mondiale de la pêche.
Pour obtenir ces résultats, les chercheurs appartenant à des ONG (Global Fishing Watch, National Geographic Society, SkyTruth), des universités (Californie et Stanford aux Etats-Unis, Dalhousie au Canada) ainsi que Google ont récupéré 22 milliards de messages diffusés depuis les positions des systèmes d’identification automatique (SIA) des navires entre 2012 et 2016. Ces SIA, à l’origine conçus pour éviter les collisions, donnent l’identité des bateaux, leur position, leur vitesse et leur angle de rotation chaque poignée de secondes, enregistrés par des satellites et des stations au sol.Technologie d’apprentissage automatique
Les scientifiques ont exploité cette gigantesque masse de données grâce à une technologie d’apprentissage automatique qu’ils ont développée (deux réseaux neuronaux convolutifs, outils couramment utilisés dans la reconnaissance avancée d’images). L’algorithme a pu identifier 70 000 navires commerciaux, leur taille et leur puissance, leur comportement (pêche ou navigation), le type de prises qu’ils pratiquent, ainsi que le lieu et le moment où ils opèrent à l’heure et au kilomètre près. Cet échantillon représente plus des trois quarts des bâtiments de plus de 36 mètres dans le monde.Résultat : ces bateaux ont exploité 55 % de la surface des mers en 2016, soit 200 millions de km2 (contre 50 millions occupés par l’agriculture). « Mais ces données ne tiennent pas compte des régions où la couverture par satellite est mauvaise ou des zones économiques exclusives [ZEE] présentant un faible pourcentage de navires qui utilisent un système d’identification automatique », notent les auteurs. Par extrapolation, ils jugent que la pêche industrielle a plutôt concerné 73 % de la superficie des océans.
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