mardi 1 mars 2022

« Plus d’excuses ni de greenwashing » après le rapport du GIEC, de nouveaux appels au sursaut

 Les pays vulnérables ont appelé lundi à la mise en place urgente de nouveaux financements pour s’adapter aux effets désastreux du changement climatique.

« Tableau désastreux », « risques terribles »« conséquences catastrophiques »« situation désespérée ». Les réactions au nouveau rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié lundi 28 février, ont donné lieu à une profusion d’adjectifs pour tenter de résumer la réalité décrite par les scientifiques : des impacts toujours plus ravageurs, généralisés et souvent irréversibles entraînés par le changement climatique d’origine humaine, qui poussent les sociétés et la nature jusqu’aux limites de leur capacité d’adaptation.

« J’ai vu de nombreux rapports scientifiques dans ma vie, mais rien de comparable à celui-ci », a réagi le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, décrivant « un atlas de la souffrance humaine »« Près de la moitié de l’humanité vit dans la zone de danger  maintenant. De nombreux écosystèmes ont atteint le point de non-retour, maintenant. Les faits sont indéniables », a-t-il martelé.

Les conclusions du rapport ressemblent à un « cauchemar », mais elles sont une « réalité quotidienne » pour les familles du Kenya et plus largement des pays du Sud, avertit Susan Otieno, directrice exécutive d’ActionAid Kenya. « Plus de 1,4 million d’animaux sont morts à cause de la sécheresse actuelle, privant les éleveurs de leur seul moyen pour subvenir aux besoins de leurs familles. Nous craignons que bientôt ce soit les enfants qui meurent de soif et de faim. »

« Si vous vouliez une bonne nouvelle pour changer, regardez ailleurs », a lancé Dave Reay, directeur du Climate Change Institute, de l’université d’Edimbourg (Ecosse). Utilisant la métaphore de l’effet domino, il juge que le changement climatique du XXIe siècle « menace de détruire les fondements de la sécurité alimentaire et en eau, de la santé humaine et des écosystèmes et, finalement, d’ébranler les piliers mêmes de la civilisation humaine ».

Après le constat, les appels sont se multipliés en faveur d’une action urgente. D’abord pour s’adapter aux impacts, mais aussi pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, notamment des principaux pays pollueurs, puisque le rapport montre que l’adaptation ne suffira pas. « La science du climat est unanime depuis des décennies : nous devons cesser de brûler des combustibles fossiles », rappelle Olha Boiko, coordinatrice du Climate Action Network Europe de l’Est, qui ajoute qu’avec la guerre en Ukraine, « nous voyons aujourd’hui comment la dépendance aux combustibles fossiles et les conflits sont imbriqués ».

« Il y a trois mois, à Glasgow, lors de la COP26, toutes les grandes économies ont convenu de renforcer leurs ambitions. Alors que nous entrons dans la zone de danger climatique, il est essentiel qu’elles présentent de nouveaux plans ambitieux en 2022. Il n’y a plus d’excuses ni de greenwashing », avertit Laurence Tubiana, l’une des architectes de l’accord de Paris sur le climat de 2015.

« Le déni et l’attente ne constituent pas des stratégies, mais une recette pour le désastre », a prévenu, quant à lui, John Kerry, envoyé spécial des Etats-Unis pour le climat. Jusqu’à présent, les efforts ont été « trop limités et trop fragmentés » pour répondre à l’ampleur des impacts actuels et à venir, indique-t-il, en écho au GIEC. Pour non plus « éviter la crise, mais ses pires conséquences », John Kerry appelle à « investir dans les communautés, construire des systèmes résistants au climat et préserver les écosystèmes essentiels au cours de cette décennie décisive ».

Promesse non tenue

Si cette adaptation n’est pas à la hauteur des défis du changement climatique, c’est à cause des pays riches, critique Mohamed Adow, directeur du think tank Power Shift Africa. « Les pays du Nord et pollueurs ont modifié la planète en brûlant des énergies fossiles et refusent à présent d’aider ceux qui en subissent les conséquences », regrette-t-il.

Les pays les plus vulnérables, les plus touchés par les impacts du changement climatique, demandent alors aux pays riches, majoritairement responsables de la crise climatique, de rembourser leur dette. Les pays développés n’ont en effet toujours pas tenu leur promesse, pourtant faite il y a douze ans, de mobiliser 100 milliards de dollars (89 milliards d’euros) par an à partir de 2020 pour aider les pays en développement à s’adapter au changement climatique et à réduire leurs émissions. Madeleine Diouf Sarr, présidente du groupe des pays les moins avancés (PMA), qui représente 46 des pays les plus pauvres, leur demande de « combler de toute urgence » ce « manque à gagner ».

Alors que les systèmes de financement actuels sont « insuffisants » mais aussi « inaccessibles » pour la majorité des petits Etats insulaires en développement, « il est primordial que les nations développées respectent l’engagement de doubler l’aide consacrée à l’adaptation », pris lors de la COP26, estime de son côté Gaston Browne, premier ministre d’Antigua-et-Barbuda, qui représente le groupe des îles. Aujourd’hui, seulement 25 % des fonds vont à l’adaptation, contre 65 % à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Les pays en développement ont, en outre, de nouveau réclamé un financement spécifique des « pertes et dommages », c’est-à-dire les dégâts irréversibles causés par le changement climatique auxquels il n’est plus possible de s’adapter, que le rapport du GIEC met en lumière.

En France, Clément Sénéchal, chargé de campagne climat pour Greenpeace, demande, lui aussi, un « partage de l’effort efficace et équitable », en mettant d’abord à contribution ceux qui émettent le plus de gaz à effet de serre, notamment les plus riches et les multinationales. Le WWF appelle les candidats à l’élection présidentielle à « tirer les leçons » de ce rapport et propose l’instauration d’un « passe climatique » à l’Elysée, afin d’« assurer que toutes les prochaines décisions soient adaptées à la crise écologique ».

Du côté des candidats à l’élection présidentielle, absorbés par la guerre en Ukraine mais aussi par le Salon de l’agriculture, seuls trois d’entre eux avaient réagi lundi en fin de journée sur Twitter. Yannick Jadot (Europe Ecologie-Les Verts) a indiqué que « nous devons agir, dès maintenant », tandis que Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) écrivait : « La guerre au pire moment, quand il faudrait s’unir face au chaos climatique. Enième alerte du GIEC : il faut bifurquer d’urgence. » « Sortons de l’inaction climatique et agissons urgemment pour protéger notre biodiversité », a pour sa part écrit Anne Hidalgo (Parti socialiste).

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