jeudi 13 août 2020

La très fragile amélioration des eaux du littoral français

 Globalement, le milieu marin est en meilleure santé aujourd'hui que dans les années 1970-80, selon l'Ifremer, qui publie pour la première fois un état des lieux. Mais la présence accrue de polluants émergents, non encore réglementés, est jugée inquiétante.

Satisfaisant, mais bien fragile. L'état de santé du milieu marin sur les côtes françaises, réceptacle d'un très grand nombre de pollutions plastique, chimique et biologique dont beaucoup viennent de la terre, tient sur un fil. « La situation tend à s'améliorer lentement, mais il reste des marges de progrès considérables en matière de qualité des eaux du littoral », prévient le PDG de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer), François Houllier.

Dans le premier état des lieux rendu public depuis la création de l'établissement il y a plus de trente ans, l'Ifremer constate que la contamination chimique a chuté depuis les années 1970. Métaux, hydrocarbures, dioxines… Les niveaux mesurés (dans la chair des moules et des huîtres) par ses chercheurs sont « généralement » en dessous des seuils réglementaires, « à l'exception de certaines zones comme les alentours des métropoles, des grandes stations d'épuration et les estuaires des fleuves ».

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Parmi les grands points « de vigilance », l'embouchure de la Gironde : des décennies après la fermeture d'une usine à 300 kilomètres en amont, qui stockait des déchets de minerai chargés en cadmium, la substance se retrouve encore par endroits en concentration supérieure au seuil autorisé. En Baie de Seine, des contaminants, là aussi anciens, persistent dans l'environnement : l'Ifremer observe que des dioxines et des PCB - des polluants organiques interdits depuis 1987 -, sont présents à des niveaux toujours trop élevés pour qu'une culture de mollusques marins puisse être développée.

Polluants émergents

Cette contamination chimique historique, qui est souvent l'héritage du passé industriel d'une région, tend à baisser. Le responsable du laboratoire de biogéochimie et écotoxicologie, Emmanuel Ponzevera, souligne également « l'impact positif des politiques publiques et de la réglementation ». Pour autant, d'autres polluants, liés notamment à des produits non réglementés, ont émergé de façon inquiétante. C'est le cas des acides carboxyliques perfluorés (PFCA en anglais), un produit non réglementé, candidat à la liste des « substances extrêmement préoccupantes » pour la santé, rappelle l'Ifremer, qui observe des quantités de plus en plus importantes.

Autre point sombre, près de 7 % des eaux côtières de la métropole « n'atteignent pas le bon état écologique ». En clair, micro ou macro-algues y prolifèrent. Un phénomène d'eutrophisation qui prend la forme d'algues vertes sur les côtes bretonnes, de mousses, qui peuvent dépasser « un mètre d'épaisseur dans certaines zones des Hauts-de-France », ou encore d'eaux colorées en Bretagne sud, a établi l'Institut.

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Pour l'aider à étudier ce dernier phénomène, difficile à repérer car souvent localisé et de courte durée, l'Ifremer s'appuie sur un programme de science participative qu'elle a lancé en 2013 mais qui reste peu connu. Baptisé « phenomer », ce projet appelle les citoyens à signaler les phénomènes d'eaux colorées, de mousse ou de mortalité massive de poissons. « C'est aussi pour cela qu'on communique cette année », explique Philippe Riou, le directeur du département Océanographie et Dynamique des Ecosystèmes, « il est précieux de bénéficier de l'alerte des citoyens ».

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Reste que quand les eaux sont contaminées, le reflux se fait la plupart du temps très lentement. Il peut falloir des décennies pour voir une amélioration réelle, à l'image de l'étang de Thau, dans l'Hérault. L'Ifremer pointe qu'il aura fallu plus de trente ans après la mise en service de la station d'épuration de la région de Sète , dans les années 1970, pour que les eaux de la lagune soient à nouveau en bon état.

Muryel Jacque

 

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