vendredi 21 novembre 2025

Guerre en Ukraine : l'Europe et la trahison américaine

Ce n'est pas un plan de paix, mais les préparatifs d'une offensive russe décisive que propose Trump à l'Ukraine. L'Europe restera-t-elle sans rien faire devant ce qui ressemble à un nouveau Munich, s'interroge Dominique Moïsi (géopolitologue, conseiller spécial de l’Institut Montaigne.)? « Donald Trump est-il un agent au service de Moscou ? ». C'était la question que je posais dans ma chronique en date du 21 février dernier, dans les colonnes des Echos. Cette interrogation est d'une troublante actualité au lendemain des révélations sur le très probable« Plan de Paix en vingt-huit points » sur l'Ukraine, distillé par la presse. Il est difficile de voir en ce projet autre chose qu'un Plan Poutine. Son contenu, et plus encore presque, son calendrier, semblent correspondre, pour l'essentiel, aux intentions et aux intérêts du Maitre du Kremlin. Zelensky, au lendemain des révélations sur un scandale de corruption qui touche son entourage proche, n'a jamais paru plus vulnérable. Et la Russie multiplie les frappes sanglantes contre des objectifs civils ukrainiens. Une trahison préparée de longue date Le message est clair. « Vous n'allez pas sacrifier vos vies pour un régime corrompu ». « Vous avez perdu, capitulez, si vous ne voulez pas faire face à un hiver dans les ténèbres et le froid ». C'est ce moment privilégié vu de Moscou, que Trump choisit pour « trahir » ouvertement l'Ukraine. En février dernier, j'évoquais dans ma chronique, l'année 1756 et le concept de renversement d'alliance. L'Amérique s'aligne clairement sur l'agresseur, la Russie, au détriment de l'agressé, l'Ukraine, tout comme la France avait choisi hier l'Autriche au détriment de la Prusse. Cette trahison de Kiev par Washington semble avoir été préparée de longue date. Elle s'est avancée masquée, à l'abri depropos délibérément ambigus (« Poutine me mène en bateau… je suis très déçu par lui »). Mais à la lecture du Plan Trump, qui n'est pour l'essentiel que la réitération du Plan Poutine, le doute n'est pas permis. Si Trump n'est pas un agent de Moscou au sens propre du terme, pourquoi se comporte-t-il comme s'il était le joker du Kremlin ? Est-il « tenu » par une Russie héritière de l'histoire et des méthodes de l'URSS qui a sur lui des secrets (de nature probablement plus financière que sexuelle) : une sorte de dossier Epstein bis ? Ce que Washington s'apprêterait à proposer (à imposer ?) à Kiev n'est rien moins qu'une capitulation. L'acceptation des conquêtes territoriales réalisées par la Russie en près de quatre années de guerre, et même un peu plus, avec par exemple, il suffit de regarder les cartes, une frontière russe qui se rapprocherait dangereusement d'Odessa. Et la réduction de moitié de l'armée ukrainienne, ainsi que l'interdiction faite aux alliés de Kiev de livrer de nouvelles armes à l'Ukraine. Et tout cela contre « une garantie de sécurité » offerte par l'Amérique. Ce n'est pas un Plan de Paix, ce sont les préparatifs d'une nouvelle offensive, plus complète et plus décisive. Tout se passe, pour faire référence à l'Othello de Shakespeare, comme si Iago (Trump) offrait sa garantie de protection à Desdémone (Zelensky). L'Histoire se répète 1938-2026 : l'Histoire ne balbutie pas. Elle se répète. Avec la même inexorable conclusion : la guerre qui vient. Munich hier, Kiev aujourd'hui. Le déshonneur aujourd'hui, la guerre demain. La « Ministre des Affaires étrangères de l'Europe », l'ancienne Première ministre d'Estonie, Kaja Kallas sait trouver les mots justes pour dénoncer cette « trahison ». Mais elle n'en « impose pas » face à Trump et Poutine. La féminité et la grâce en plus, le faux irénisme en moins, elle est plus proche de Daladier et de Chamberlain que de Churchill. Sommes-nous à ce point aveugles pour ne pas voir que, comme en 1938, ce qui se profile à l'horizon c'est la guerre en Europe dans son ensemble ? Il existe pourtant une différence majeure entre 1938 et 2025. En 1938, l'Amérique était la spectatrice de la trahison de l'Europe. En 2025, est-ce l'Europe qui sera la spectatrice de la trahison de l'Amérique ? Ou bien un miracle peut-il se produire ? L'Europe saura-t-elle tirer les leçons de l'Histoire, galvanisée comme elle devrait l'être, par le courage et la résilience du peuple ukrainien ? Révulsée aussi par le comportement de l'Amérique, saura-t-elle dépasser ses divisions internes ? Et transcender ses problématiques anachroniques en substituant son aide et sa garantie à celle de l'Amérique ? Bref se comporter en adulte ? La réponse devrait être simple, tant le défi est évident. Une fois ayant transformé l'Ukraine en Biélorussie, la Russie n'en restera pas là. Sommes-nous à ce point aveugles pour ne pas voir que, comme en 1938, ce qui se profile à l'horizon c'est la guerre en Europe dans son ensemble ? Une guerre qui a déjà commencé, avec la stratégie de tension permanente mise en oeuvre par la Russie de Poutine. Nous avons la capacité de dire « Non » à ce très probable diktat américano-russe. En avons-nous la volonté ? Dominique Moïsi est géopolitologue.

lundi 20 octobre 2025

Cour des comptes : rapport sur le réseau des chambres d'agriculture depuis leur régionalisation

Voir le récent rapport de la Cour des comptes. La partie sur l'accompagnement des transitions (phyto, eau, bio) commence p.61. Les chambres d’agriculture, créées en 1851 et devenues dans les années 1960 un vecteur majeur du conseil aux paysans, jouent aujourd’hui encore un rôle central auprès des agriculteurs dans un contexte de transitions économique, sanitaire, environnementale et de souveraineté. Régies par le statut d’établissements publics et gouvernées par des élus, elles regroupent 100 établissements, emploient 8 200 salariés et disposent d’un budget annuel de près de 800 M€, financé pour les trois quarts par des ressources publiques. La Cour des comptes, dans son rapport, porte une appréciation sur leur fonctionnement et leur action, en examinant l’effectivité de leur structuration en « réseau des chambres d’agriculture », leur performance économique et financière, l’exercice des missions de service public, ainsi que la tutelle exercée par l’État. Si des avancées récentes sont à mettre à l’actif du ministère de l’agriculture et de Chambres d’agriculture France, des transformations restent nécessaires afin de renforcer la cohérence du réseau, l’accompagnement des agriculteurs dans les transitions et la responsabilité budgétaire, alors que le nombre de paysans continue de diminuer et que la part de l’agriculture dans le PIB s’est stabilisée à moins de 2 %. Une régionalisation inaboutie Depuis 2016, les pouvoirs publics ont poussé les chambres d’agriculture à renforcer leur échelon régional afin de gagner en efficacité, avec le décret du 13 mai 2016 imposant la mutualisation des services supports et la possibilité de fusionner les chambres départementales. En 2025, le paysage institutionnel reste pourtant marqué par des niveaux encore limités et disparates d’intégration : la plupart des chambres départementales ont conservé leur existence juridique pleine et entière et la mutualisation des fonctions demeure inégale et insuffisante. Cinq chambres de région ont bien été créées et certaines régions, comme la Bretagne, la Normandie ou les Pays de Loire, ont expérimenté une organisation plus intégrée, mais ailleurs la réforme se heurte à la persistance du fait départemental, voire à des résistances directes. A l’issue de la période couverte par le contrat d’objectifs et de performance (COP), de 2021 à 2025, la Cour souligne que les dispositions du décret doivent désormais être respectées sans délai et recommande de généraliser les chambres de région avec des chambres territoriales comme outil de proximité, de régionaliser la légitimité électorale et d’engager une réforme du financement par la taxe pour frais de chambres afin qu’elle relève du niveau national, comme dans les deux autres réseaux consulaires. Une dynamique d’intégration dont la tête de réseau et l’État doivent encore pleinement s’emparer. Le renforcement de l’efficacité du réseau des chambres d’agriculture passe par celui de sa tête et de ses moyens d’action, ainsi que par l’effectivité de la tutelle de l’État au niveau national et local. L’élaboration en 2019 d’un premier projet stratégique commun et, en 2021, d’un premier contrat d’objectifs et de performance signé avec l’État ont posé les bases d’une intégration renforcée. Depuis 2022, la tête de réseau dispose de compétences juridiques élargies et d’un pouvoir de sanction reconnu par la loi d’orientation agricole du 24 mars 2025, mais elle doit encore mieux faire respecter ses normes, assurer l’unification des systèmes d’information, moderniser la gestion des ressources humaines et immobilières, et développer les incitations financières à l’intégration. Le plein exercice de la tutelle reste un corollaire indispensable : la tutelle budgétaire doit être adaptée aux situations dégradées, la tutelle juridique clarifiée pour s’appliquer plus efficacement, et une tutelle « métiers » doit être structurée autour du prochain contrat d’objectifs. Enfin, une vigilance accrue est nécessaire face aux irrégularités constatées par la Cour, notamment en matière de gouvernance, de subventions syndicales, de participations financières, de fiscalité et de probité. Des missions à recentrer sur l’accompagnement de l’agriculture française dans les transitions Le réseau des chambres d’agriculture exerce aujourd’hui une grande diversité de missions. Celles-ci devront être recentrées sur quelques priorités claires autour de l’accompagnement des agriculteurs dans les transitions économique, sanitaire et environnementale. En matière de missions de service public, le réseau devra assumer à compter du 1er janvier 2026 de nouvelles responsabilités pour l’identification animale, et améliorer dès le 1er janvier 2027 sa contribution à l’installation et à la transmission des exploitations dans le cadre de France Services Agriculture. Le réseau et la tutelle devront s’assurer des moyens nécessaires à l’exercice de ces missions, en retraçant mieux l’évolution de l’impact de celles qui sont abandonnées ou transférées vers les chambres. Afin de mieux accompagner les agriculteurs dans les transitions, le déploiement d’un conseil global et stratégique, dans le cadre d’une offre nationale de services rationalisée, doit devenir une priorité affirmée du réseau et de l’État. La stratégie numérique devra également s’amplifier, notamment autour du portail « Mes Parcelles », afin de renforcer l’efficacité et la cohérence de l’action. Enfin, le réseau devra mieux répondre aux enjeux environnementaux par un engagement beaucoup plus marqué en faveur de l’agroécologie et de l’agriculture biologique, ainsi que dans la gestion de l’eau et de la forêt. Une lisibilité financière et une efficience du réseau qui doivent progresser La situation financière du réseau des chambres d’agriculture reste marquée par un manque de lisibilité et de fiabilité. La Cour a constaté la difficulté à consolider les comptes des différents niveaux malgré les travaux engagés pour automatiser la remontée des données d’ici 2026. Les produits du réseau se sont élevés à 794 millions d’euros en 2023, dont près des trois quarts issus de ressources publiques. Dans le même temps, les charges d’exploitation, dominées par les frais de personnel (56 % en moyenne, jusqu’à 70 % Outre-mer), ne diminuent pas. Si certaines chambres ont dégagé des excédents, près de 42 % étaient déficitaires en 2023. La situation est particulièrement fragile en Corse et Outre-mer, où la conjonction de difficultés structurelles agricoles et de choix de gestion discutables réduit la capacité contributive. Le prochain contrat d’objectifs et de performance devra fixer des cibles plus ambitieuses, garantir une comptabilité analytique fiable, généraliser la certification du service rendu et assurer le suivi des gains attendus de la mutualisation, qui n’a pas encore produit les économies espérées malgré un budget régional en hausse de 50 à 70 millions d’euros par an depuis 2017.

Placer la PAC dans un fonds plus large pourrait « pousser les instances agricoles à s’ouvrir » à d’autres secteurs, estime Collectif Nourrir

Cette réforme pourrait permettre d’impliquer davantage les secteurs de l’environnement et de la santé dans les négociations agricoles à venir, ce qui aurait un « effet positif », souligne le collectif, dans une note, le 15 octobre. Le collectif s’inquiète, à l’instar de l’Iddri, de la subsidiarité accrue concédée aux États dans l’élaboration de leurs plans de partenariats régionaux et locaux et de la faiblesse des prérogatives de la Commission pour les suivre et les contrôler. Collectif Nourrir redoute ainsi que les 300 milliards d’euros sanctuarisés pour l’agriculture dans la future PAC soient essentiellement employés par les États pour financer les paiements à la surface, au détriment des mesures environnementales et de la transition. S’il estime que la dégressivité et le ciblage sont « une bonne idée », ces mesures risquent néanmoins de produire peu d’effets, au vu de la marge de manœuvre concédée aux États. Le collectif suggère ainsi de durcir les critères de l’agriculteur actif et de renforcer les outils de l’organisation commune des marchés pour maîtriser les prix et les volumes. Il propose aussi que des objectifs environnementaux clairs et des financements spécifiques soient inclus dans la PAC, et qu’un socle commun minimal soit défini pour les pratiques de protection, qui doivent succéder aux bonnes conditions agricoles et environnementales.

Les services de la Commission estiment que l’ARN et les ciseaux moléculaires pourraient être une « alternative » aux pesticides

En plus du biocontrôle, « deux technologies majeures basées sur l’ADN ou l’ARN présentent un intérêt particulier : les technologies ARNi et Crispr-Cas », conclut ainsi le Centre commun de recherche de la Commission (JRC), dans un rapport, publié en octobre. Ces technologies d’édition génique, aussi employées pour obtenir les plantes dites « NGT », pourraient être utiles pour concevoir des « alternatives » aux pesticides chimiques, estiment ses chercheurs. Les services de la Commission les jugent ainsi « prometteuses » pour lutter contre les insectes ravageurs et la sécheresse, bien qu’elles se heurtent à plusieurs obstacles, puisque seulement quelques-unes sont actuellement autorisées. Estimant « peu probables » leurs effets indésirables sur les espèces non ciblées, le JRC préconise donc de démontrer leur sûreté par une évaluation des risques, « tant pour les plantes modifiées que pour les produits transitoires ». « Il est essentiel de répondre aux préoccupations concernant l’efficacité, la sécurité, l’absence de résistance, les considérations éthiques et la réglementation », assurent-ils, rappelant qu’il n’existe aucune réglementation juridique harmonisée spécifique aux protocoles basés sur l’ARNi et Crispr-Cas pour évaluer ces nouveaux pesticides.

L'UE continue d'exporter des milliers de tonnes de pesticides interdits

En 2024, l'Union européenne a exporté à l'étranger plus de 120 000 tonnes de pesticides interdits sur son propre territoire, soit une augmentation de 50 % par rapport à 2018, comme le révèle un rapport publié fin septembre par Public Eye et Unearthed. Si l'on tient compte du Brexit en retirant les exportations du Royaume-Uni des statistiques de 2018, les exportations de pesticides interdits de l'UE ont en réalité plus que doublé entre 2018 et 2024. L'Allemagne a désormais remplacé le Royaume-Uni comme premier exportateur de l'UE, avec environ 50 000 tonnes expédiées, représentant plus de 40 % du volume total déclaré à l'exportation par le bloc l'année dernière. La France, malgré une interdiction d'exporter les pesticides contenant des substances interdites dès 2022 (loi Égalim), a continué d'en exporter plus de 6 000 tonnes l'an dernier, dont une bonne partie au Brésil. L'interdiction n'est pas appliquée intégralement à cause de failles dans la loi, notamment car elle ne cible pas l'exportation des substances actives pures, ce qui a permis aux entreprises de continuer à les exporter. Ces substances sont interdites d'usage dans l'UE en raison de leur dangerosité avérée pour la santé et l'environnement. Pourtant, elles continuent d’être produites et vendues hors de nos frontières. Le dichloropropène, neurotoxique banni en 2007, la picoxystrobine, interdite depuis 2017 pour ses effets génotoxiques, ou encore le fipronil, reconnu responsable de l'effondrement des populations de pollinisateurs, en sont quelques exemples.

lundi 13 octobre 2025

Le Parlement européen vote pour assouplir encore davantage la conditionnalité environnementale de la PAC

Les amendements issus de la commission de l’agriculture ont été adoptés, le 8 octobre, lors du vote en plénière sur le rapport du Parlement sur le paquet simplification de la Politique agricole commune actuelle. Il a été approuvé avec 492 voix pour, 111 contre, et 39 abstentions. Assouplissant encore davantage la définition – et la protection – des prairies permanentes (BCAE 1), les députés demandent aussi la suppression des BCAE 5 (protection des sols contre l’érosion) et 9 (protection des prairies permanentes des zones Natura 2 000). Ils souhaitent que les exploitations mixtes, en conversion, ou situées dans des zones Natura 2 000 soient exemptées de conditionnalité. Le WWF et le Bureau européen de l’environnement ont déploré ce résultat, qui entérine ainsi le mandat du Parlement pour les négociations à venir avec la Commission et le Conseil de l’UE. Le premier trilogue est prévu pour le 17 octobre. Découvrez le kit de survie de Contexte Agro pour les négociations à venir.

Réchauffement des océans : le constat alarmant du rapport européen Copernicus

Réchauffement, pollution, perte de biodiversité... la santé des océans continue de se dégrader. Le 9e rapport sur l'état des océans publié par l'Institut européen Copernicus et l'organisation scientifique Mercator Ocean International montre que tous les océans du monde sont désormais menacés. Alors que les océans couvrent plus de 70% de la surface du globe, "aucune partie de l'océan n'est épargnée par la triple crise planétaire : la pollution, la perte de biodiversité et le changement climatique". Les conclusions du rapport de l'Institut européen Copernicus et l'organisation scientifique Mercator Ocean International publié le 30 septembre 2025 montrent que l'état de santé des océans continue de se dégrader. Le rapport annuel sur l'état des océans (OSR), lancé en 2015, rend compte de l'état de la variabilité et des changements en cours dans l'environnement marin de l'océan mondial et des mers régionales européennes au cours des dernières décennies. L'édition 2025 met l'accent sur les événements extrêmes de 2023 et 2024 et sur l'interdépendance profonde des impacts du changement océanique avec les changements dans les écosystèmes marins, les sociétés humaines, la culture et l'économie. Réchauffement, montée des eaux, acidification, fonte des glaces... Les travaux de 70 scientifiques d'Europe et du monde entier ont permis de constater de nombreux changements océaniques : un réchauffement record de la température de l'océan en 2024 (il absorbe 90% de l'excès de chaleur généré par les émissions de gaz à effet de serre). La température a dépassé les 21°C en surface, atteignant un niveau record au printemps 2024 ; une montée sans précédent du niveau de la mer (228 millimètres entre 1901 et 2024) qui met en danger près de 200 millions de personnes installées le long des côtes mais aussi des sites du patrimoine mondial de l'Unesco ; le développement d'espèces invasives, comme le crabe bleu dans le delta du Pô et les vers à feu barbus (vers marins d'origine tropicale ou équatoriale) en Sicile ; une hausse de l'acidification des océans ; le déclin de la glace de l'Arctique (quatrième plus bas niveau historique entre décembre 2024 et mars 2025 avec, en mars 2025, une surface de glace inférieure de 1,2 million de kilomètres carrés par rapport à la moyenne hivernale de long terme). Ces phénomènes menacent les espèces et les écosystèmes et affaiblissent le rôle de l'océan dans la stabilité climatique mondiale. ntensification des canicules marines en 2023 et en 2024 Le réchauffement concerne toutes les zones maritimes mais touche plus rapidement les mers semi-fermées, en particulier la mer Méditerranée (4,3 °C au dessus des normales de mai 2022 à janvier 2023) tandis que la température des eaux de l'Atlantique Nord est passée pour la première fois au dessus des 20 °C en 2023. Le rapport analyse plus particulièrement les vagues de chaleur marines (VCM) devenues plus intenses et plus fréquentes et plus longues. Il s'agit de "hausses extrêmes de la température de l'océan pendant une période prolongée" selon Copernicus. En 2023, la plus longue vague de chaleur depuis 40 ans a été relevée en Méditerranée. Conséquences : des espèces invasives (crabe bleu, par exemple) se sont propagées, entraînant d'importantes pertes économiques pour la pêche en Italie. Au Canada, au large de la Nouvelle-Écosse, la chaleur des fonds océaniques a fait fuir les homards entraînant une hausse de leur capture entre 2008 et 2023. Sur le plateau de Terre-Neuve, la faiblesse des vents mais aussi notamment la forte densité d'eau douce ont favorisé une VCM de surface aux températures "inhabituellement élevées" pendant l'été et l'automne 2023.

jeudi 25 septembre 2025

Une septième « limite planétaire » vient d’être franchie, la Terre est en train de devenir inhabitable

 ENVIRONNEMENT - La Planète bleue est gravement malade. Le niveau d’acidification des océans, qui regroupent 97 % de l’eau sur Terre, a dépassé la limite compatible avec des écosystèmes stables et durables, a annoncé, ce mercredi 24 septembre, un rapport d’un institut de recherche. Et conclut que sept des neuf « limites planétaires » sont maintenant franchies.

Créées en 2009 sous l’impulsion du scientifique suédois Johan Rockström, les limites planétaires désignent les différents points à ne pas dépasser pour garder la planète dans un état vivable. Une trentaine de chercheurs estimaient il y a quinze ans que l’humanité avait « transgressé au moins trois limites planétaires ». Depuis, les bilans annuels de l'Institut de recherche sur le climat de Potsdam (PIK) ont montré une dégradation continue.

Celui de 2025 indique que la limite de « l’acidification des océans » vient d’être franchie. « L’océan est en train de s’acidifier, menaçant la vie marine et nous faisant entrer dans des conditions dangereuses, avec une tendance qui s’aggrave encore », ont écrit ses chercheurs. En d’autres termes, ce sont tous les écosystèmes marins qui sont menacés, comme en atteste le blanchissement des récifs coralliens, phénomène annonciateur de leur mort.

Excès de CO2 et révision des calculs

La principale cause de l’acidification des océans est l’absorption de dioxyde de carbone (CO2) émis avec la combustion d’énergies fossiles. Les scientifiques estiment que les océans ont absorbé environ 30 % de l’excès de CO2 relâché dans l’atmosphère par la combustion de pétrole, de gaz et de charbon.

La hausse de l’acidification par rapport aux chiffres publiés l’an dernier est également due en partie à une amélioration des données et à une révision des calculs.

Les six autres seuils déjà dépassées concernent le changement climatique (CO2 dans l’atmosphère), l’intégrité de la biosphère (extinction d’espèces et appropriation des ressources par l’humanité), mais aussi l’usage des sols (déforestation), le cycle de l’eau douce (zones touchées par la sécheresse ou les inondations), les cycles biogéochimiques (ajout d’engrais et pesticides) et l’introduction d’entités nouvelles dans la biosphère (plastiques et autres produits chimiques industriels).

Les deux limites planétaires non franchies restent les aérosols dans l’atmosphère (pollution de l’air) et le niveau d’ozone dans la stratosphère.

Le fonctionnement de la chaîne alimentaire perturbé

Si l’acidité se mesure à l’aide du pH, la référence pour cette limite est la concentration en aragonite, un minéral indispensable à la vie des coraux et animaux marins à coque. Plus l’océan est acide, plus l’aragonite se désagrège.

La limite avait été définie à 80 % de la concentration à l’ère pré-industrielle. Et les océans sont descendus sous ce niveau. « Le pH à la surface de l’océan a déjà baissé d’environ 0,1 depuis le début de l’ère industrielle. C’est l’équivalent d’une hausse de 30 à 40 % de l’acidité », relèvent les scientifiques. « Ce changement menace les organismes qui forment des coques ou squelettes en carbonate de calcium, comme les coraux, les mollusques ou des espèces cruciales du plancton. La disparition progressive de ces organismes peut perturber la chaîne alimentaire », s’inquiètent-ils.

« La vie marine va s’amenuiser. C’est très inquiétant car pour chacune des cinq grandes extinctions précédentes, la vie s’est effondrée dans les océans puis sur terre. Et la vie marine est indispensable », déplorait également Dominique Bourg, professeur des sciences de l’environnement à l’université de Lausanne, dans une interview au HuffPost en septembre 2023.

lundi 13 janvier 2025

Émissions carbone : Il a fallu 2 heures à Bernard Arnault pour polluer autant que vous en un an

 Le 10 janvier 2025, une nouvelle étape dramatique de la crise climatique a été atteinte. Les 1 % les plus riches de la planète, responsables d’émissions de gaz à effet de serre colossales, ont déjà épuisé leur quota annuel de carbone. Pendant ce temps, la moitié la plus pauvre de la population mondiale mettrait plus de trois ans à consommer la même quantité. Comment expliquer un tel déséquilibre, et surtout, comment y remédier ?

Une consommation disproportionnée et inégalitaire

Selon un rapport d’Oxfam, les 1 % les plus riches sont responsables de 15,9 % des émissions mondiales, contre seulement 7,7 % pour les 50 % les plus pauvres. Ces élites économiques, dont les revenus annuels dépassent 140 000 dollars (en parité de pouvoir d’achat), émettent en moyenne 76 tonnes de CO2 par personne et par an, soit 38 fois plus que le quota nécessaire pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C.

Tableau comparatif des émissions de CO2 en 2025 : 

Catégorie socio-économiqueEmissions moyennes (tonnes CO2/personne/an)Durée pour consommer le budget annuel (2 tonnes)
1 % les plus riches7610 jours
50 % les plus pauvres0,71 022 jours

Un mode de vie à très forte empreinte carbone

Les jets privés, yachts et résidences luxueuses des ultra-riches sont emblématiques de leur consommation énergétique excessive. Par exemple, un yacht peut polluer jusqu’à 7 000 tonnes de CO2 en une seule année, tandis qu’un vol transatlantique en jet privé émet plusieurs tonnes de GES. Ces pratiques contrastent fortement avec les efforts demandés à la majorité pour réduire leur empreinte carbone.

Oxfam souligne également que ces émissions ne se limitent pas au style de vie personnel. Les investissements massifs dans des secteurs polluants, comme l’industrie fossile, contribuent largement à l’aggravation de la crise climatique. Selon Nafkote Dabi, responsable climatique chez Oxfam International : « Les riches pollueurs privent des milliards de personnes de leur avenir pour satisfaire leur avidité ».

Des conséquences mondiales dévastatrices

Les inégalités climatiques entraînent des pertes économiques, des migrations forcées et des décès évitables, principalement dans les pays du Sud global. Entre 1990 et 2025, les émissions excessives des 1 % les plus riches ont causé des dommages estimés à des milliers de milliards de dollars, des récoltes détruites et des millions de morts liés à des vagues de chaleur. Exemple chiffré : en Asie du Sud, 40 % des décès dus à la chaleur affecteront les populations les plus vulnérables.

Cependant, plusieurs propositions émergent pour limiter l’impact des plus riches sur le climat :

  • Taxer les produits de luxe à forte empreinte carbone, comme les jets privés et les yachts.
  • Imposer une réduction des émissions de 97 % d’ici 2030 pour les 1 % les plus riches.
  • Créer un fonds mondial pour le financement climatique, financé par des taxes sur les grandes fortunes, afin d’aider les pays vulnérables à s’adapter aux changements climatiques.
  • Interdire les investissements polluants, en régulant plus strictement les marchés financiers et les grandes entreprises.

Guerre en Ukraine : l'Europe et la trahison américaine

Ce n'est pas un plan de paix, mais les préparatifs d'une offensive russe décisive que propose Trump à l'Ukraine. L'Europe re...