dimanche 23 décembre 2018

Dans la balance du vivant, les hommes ne pèsent pas bien lourd

Trois chercheurs israéliens et américains ont estimé en juin la masse totale des êtres vivants sur la Terre. Et les humains y tiennent une place ridiculement insignifiante.
Combien pèsent tous les êtres vivants sur Terre ? C’est à cette question que trois chercheurs ont tenté de répondre le plus précisément possible dans une étude publiée en juin dans Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS). Selon eux, la masse totale de la vie sur notre planète – ce que l’on appelle la biomasse – est égale à 550 milliards de tonnes de carbone (mesurer seulement la masse de carbone, l’élément le plus abondant dans la chimie de la vie sur Terre, permet d’exclure la masse d’eau, qui peut varier fortement d’un individu à l’autre).
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’écrasante majorité de la masse du vivant vient du règne végétal. Les végétaux (au sens large) représentent 82 % de la masse totale avec 450 milliards de tonnes de carbone (Gt C). Suit une seconde surprise pour qui s’avancerait à mettre le règne animal en seconde position : les bactéries représentent le deuxième taxon (groupe d’organismes) le plus massif : pas moins de 70 Gt C sont dénombrées dans l’étude. Les champignons complètent le podium (eh oui !) avec une masse estimée à 12 Gt C. Suivent ensuite les archées et les protistes (des micro-organismes) avec des masses estimées respectivement à 7 et 4 Gt C. Les animaux ? Seulement 2 Gt C. Bien loin d’être les plus massifs, les humains ne représentent que 60 millions de tonnes de carbone, soit environ 1 166 fois moins que… les bactéries.
Le graphique ci-dessous représente la répartition de la biomasse par grandes familles d’êtres vivants.
En masse, les plantes dominent le monde
Masse de la biosphère présente sur Terre, classée par familles d'êtres vivants (taxons), exprimée en milliards de tonnes de carbone (Gt C).
 
Si la vie sur terre est née dans les eaux, elle a depuis très largement migré sur les terres émergées de la planète, puisque celles-ci concentrent 86 % de la masse du vivant. Les milieux souterrains contiennent, eux, presque douze fois plus de biomasse que les milieux marins, qui n’abritent qu’un pourcent de la biomasse totale.

L'immense majorité de la vie terrestre se trouve sur les terres émergées

Répartition de la biomasse terrestre selon son type d'environnement.
Si l’on s’intéresse aux taxons que l’on connaît le mieux, les règnes végétaux et animaux, on constate que les premiers sont quasi exclusivement terrestres, alors que les seconds sont très majoritairement marins. Ceci tient notamment au fait que les poissons sont beaucoup plus nombreux que les animaux terrestres, notamment les mammifères.

Les plantes sont largement terrestres, mais les animaux majoritairement marins

 

La dramatique signature des humains

Les auteurs notent que la masse des humains et du bétail (1,6 Gt C) surpasse très largement celle de tous les mammifères sauvages de la planète (0,007 Gt C), signe de l’emprise des activités humaines sur la biomasse et des conséquences gigantesques qui ont suivi la naissance de l’agriculture, la domestication des animaux et la révolution industrielle pour la planète.


Les humains ont également largement contribué à l’extinction de la mégafaune au quaternaire depuis 50 000 ans : la masse des mammifères sauvages terrestres avant cette période a été estimée à 0,02 Gt C, alors qu’elle est à présent de 0,003 Gt C, soit une division par presque sept. Les activités humaines ont également réduit de 0,1 Gt C la biomasse des poissons, soit à peu près autant que la taille des populations restantes aujourd’hui dans les mers et océans de la planète. L’impact de la civilisation humaine se mesure aussi nettement dans la biomasse végétale : il est estimé que la masse de la flore planétaire a été divisée par deux par rapport à son niveau précivilisationnel. Les mêmes tendances qui étaient hier à l’œuvre se poursuivent plus que jamais aujourd’hui, puisque le rythme d’extinction des animaux a été multiplié par cent depuis 1900.

Le recensement des trois chercheurs n’est pas parfait, ceux-ci font état de larges incertitudes quant à certains taxons. L’estimation de la masse de plantes est considérée comme solide, mais celles des autres, et notamment des archées, des animaux ou des virus, est soumise à des marges d’erreurs importantes. Mais ces travaux, qui sont les plus précis à ce jour, permettent de mieux comprendre la composition de la biosphère, et notamment la façon dont une espèce minoritaire, la nôtre, parvient à bousculer massivement les plus grands règnes vivants de la planète.

mardi 11 décembre 2018

Dans la baie de Somme, la densité de poissons en baisse de 80 % en trente ans

De 200 000 individus par mètre carré il y a trois décennies, on ne trouve plus que 40 000 individus aujourd’hui, selon l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer.
Que vont devenir cabillauds, flets, merlans, limandes ou autre harengs de la baie de Somme ? La densité des poissons, toutes espèces confondues, a diminué de 80 % en trente ans dans cette immense baie du littoral picard, selon une étude de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer). Elle est ainsi passée de 200 000 individus par mètre carré à 40 000 individus, conclut l’étude, qui impute cette chute à la hausse de la température de l’eau.
« Cette diminution substantielle touche principalement les espèces à croissance rapide et ainsi précocement matures pour la reproduction, comme la limande, la plie, le sprat ou le hareng », souligne l’étude, publiée dans la revue Global Change Biology. Ces espèces sont particulièrement sensibles aux variations de l’environnement, davantage que les espèces à croissance lente comme le bar par exemple, selon l’Ifremer.

Augmentation rapide de la température

Pour l’Institut, ce bouleversement est bien dû au réchauffement des océans, exacerbé dans le cas de la baie de Somme. « La température de l’eau en Manche est-Mer du Nord a connu une augmentation rapide sur la période étudiée, entre 0,3 et 0,4 °C par décennie, avec une accélération entre 1998 et 2003 (plus de 1 °C entre ces cinq années), soit une hausse quatre fois supérieure au réchauffement moyen de l’ensemble des océans », affirme l’Ifremer.
« D’ici 2100, la hausse des températures en Manche Est-Mer du Nord pourrait atteindre 2,5 à 3 °C par rapport à la période actuelle, ce qui risque d’amplifier les effets néfastes déjà observés en baie de Somme. »
Pour réaliser cette étude, l’Ifremer s’est appuyé sur des données recueillies entre 1987 et 2012 avec des engins de pêche standardisés, utilisés chaque année à la même période.


Une étude de l'Ademe condamne la filière EPR pour raison économique

Dans une étude sur l'évolution du mix électrique français de 2020 à 2060, l'Ademe prévoit une baisse du coût de l'électricité grâce à un fort développement des renouvelables tandis que la filière EPR se révèle non compétitive.
C'est une nouvelle étude qui va donner le sourire aux promoteurs des énergies renouvelables (EnR) et contrarier la filière nucléaire. L'Ademe a dévoilé ce lundi 10 décembre une analyse de l'évolution possible du mix électrique français d'ici 2060. Les dirigeants de l'établissement public souhaitent éclairer le gouvernement et les différentes parties prenantes au moment où s'ouvre la consultation sur la nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), dévoilée le 27 novembre par Emmanuel Macron, puis détaillée par François de Rugy.
Après son étude de 2015 qui envisageait une France avec 100% d'électricité renouvelable en 2050, l'Ademe a étudié sept scénarios de transition du mix électrique jusqu'à 2060. "Le parti pris dans cet exercice est de rester strictement sur une logique d'optimisation économique : il s'agit d'évaluer les trajectoires qui coûteront le moins cher pour la collectivité", explique Arnaud Leroy, président de l'Ademe.
L'étude est basée sur un outil informatique développé par la société Artelys qui évalue la composition du mix optimal pour minimiser les coûts de production du système électrique tout en respectant l'équilibre offre-demande. Plusieurs variables ont été prises en compte comme le niveau de la demande électrique, le coût des technologies ou encore la plus ou moins bonne acceptabilité des EnR.
Un coût de 39 milliards pour la Nation
Il ressort de l'étude que "le développement d'une filière EPR ne serait pas compétitif pour le système électrique français d'un point de vue économique". La construction d'un seul réacteur supplémentaire de nouvelle génération en 2030 nécessiterait 4 à 6 milliards d'euros (Md€) de soutien public en raison de ses coûts trop élevés. "Nous avons malgré cela développé un scénario « EPR en série »", explique David Marchal, directeur adjoint Productions et énergies durables à l'Ademe. Dans cette hypothèse (24 GW en 2060), l'étude chiffre à 39 Md€ le coût minimal pour la Nation, malgré la prise en compte des économies d'échelle permises par le développement des EPR en série (70 €/Mwh).
En revanche, l'étude estime économiquement et climatiquement efficient le prolongement d'une partie du parc nucléaire historique, en conformité avec l'objectif de 50 % du mix électrique entre 2030 et 2035. "Pour les scénarios étudiés, une fermeture de 30 % des réacteurs à l'âge de 40 ans, puis à nouveau de 30 % des réacteurs restants à 50 ans est possible avec un coût nul pour la France sur la période 2030-2044", indique l'Ademe.
"La fermeture systématique des centrales nucléaires à 50 ans génère des coûts supplémentaires lorsque la capacité nucléaire totale passe en deçà de 30 GW", indique toutefois l'étude. Par contre, une prolongation trop longue du nucléaire historique "déséquilibrerait la rentabilité de tous les moyens de production" en maintenant les prix de marché de gros de l'électricité à un faible niveau. Ce qui décalerait le seuil de rentabilité des EnR en 2045 mais diminuerait aussi la marge des producteurs nucléaires de 3,6 Md€ sur la période 2030-2044.
Plus de 95 % d'EnR en 2060
Cette transition vers la fin du nucléaire s'explique par la forte montée en puissance des renouvelables, même si elles n'atteindraient pas 100 % du mix électrique en 2050. Des EnR qui se développeraient sans système de soutien à partir de 2030 pour le photovoltaïque et de 2035 pour l'éolien terrestre dans la plupart des scénarios étudiés.
Pour des niveaux de demande d'électricité compris entre 430 et 600 TWh, l'optimisation économique de l'évolution du système électrique conduit à "une part d'EnR de 85 % en moyenne en 2050 et de plus de 95 % en 2060 dans l'ensemble des cas, hormis ceux avec déploiement volontariste d'EPR", indique l'Ademe. De plus, ajoute David Marchal, "réduire la demande d'électricité, grâce à l'efficacité énergétique notamment, induirait une diminution des coûts totaux du système de 7 % et des émissions de CO2 de 22 % en 2060 tout en permettant une augmentation des exportations".
Cette optimisation économique de la production devrait conduire à une baisse du coût total de l'électricité à 90 €/MWh, contre 100 €/MWh aujourd'hui. Et ce, malgré les coûts d'intégration des EnR ou les coûts de stockage, et en prenant en compte l'équilibre horaire entre l'offre et la demande.


COP 24 : La France rétrogradée en 21ème position des performances climatiques

L'indice de performance des changements climatiques 2019 (CCPI), publié le 10 décembre à la COP 24 à Katowice (Pologne), montre que seule une poignée de pays ont commencé à mettre en œuvre des stratégies visant à limiter le réchauffement de la planète en dessous de 2°C voire de 1,5°C.
Elaboré par Germanwatch, le New Climate Institute et le Climate Action Network (CAN), ce classement passe en revue 56 pays et l'Union européenne, responsables à eux seuls de près de 90 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
La France, dont les performances climatiques sont en baisse, est classée 21ème, bien loin du leader (la Suède), mais aussi du Maroc, qui a considérablement accru sa capacité en énergies renouvelables, de la Lituanie, mais devant l'Allemagne et les Pays-Bas.
L'Inde passe au onzième rang en raison d'une amélioration de ses performances en matière d'énergies renouvelables et de niveaux d'émissions par habitant relativement faibles. La Chine se rehausse au 33e rang, faisant partie pour la première fois du groupe des pays à performance moyenne.
Dans le groupe des pays très peu performants se trouvent près de la moitié des pays du G20 : Japon (49ème rang), Turquie (50), Fédération de Russie (52), Canada (54), Australie (55), Corée (57) et, au plus bas du classement, États-Unis (59) et Arabie saoudite (60).
Les trois premiers rangs du CCPI 2019 restent inoccupés, car aucun pays ne se situe sur une trajectoire nettement en dessous de 2°C.

samedi 8 décembre 2018

Accord de Paris : état des lieux des engagements nationaux

A l'occasion de l'ouverture de la COP 24 à Katowice (Pologne), Actu-Environnement revient sur la ratification de l'Accord de Paris et sur les engagements pris par les Etats à cette occasion.


Accord de Paris : état des lieux des engagements nationaux
En décembre 2013, les négociateurs internationaux réunis à Varsovie (Pologne) s'étaient accordés sur le principe d'engagements volontaires. La feuille de route adoptée à cette occasion prévoyait que les pays "qui le peuvent" fournissent leurs "contributions" de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) le plus en avance possible de la conférence de Paris planifiée fin 2015.

L'année 2015 a été marquée par la publication de nombreuses contributions intentionnelles déterminées au niveau national (INDC, pour Intended Nationally Determined Contribution). A l'ouverture de la conférence de Paris (COP 21), 183 pays avaient remis une contribution. Celles-ci sont très variées : la réduction des émissions est exprimée en valeur absolue par rapport à une date (1990, par exemple) ou en valeur relative par rapport à un scénario au fil de l'eau, les GES et les secteurs économiques couverts par l'engagement varient, et l'engagement prend en compte, ou pas, le rôle des puits carbone forestiers.

Les contributions volontaires deviennent des engagements

A l'issue de la conférence de Paris, les négociateurs ont décidé que ces contributions deviennent l'engagement officiel des Etats qui ratifient l'Accord. Aujourd'hui, 183 Etats, ainsi que l'Union européenne, ont ratifié l'Accord. La quasi-totalité des principaux pays émetteurs de gaz à effet de serre ont ratifié l'Accord et pris des engagements de réduction de leurs émissions de GES. Les principales exceptions sont la Fédération de Russie (7,53 % des émissions mondiales), l'Iran (1,30 %) et la Turquie (1,24 %), seuls pays n'ayant pas ratifié le texte et dont les émissions de GES dépassent 1 % des émissions mondiales.
Reste le cas des Etats-Unis qui ont ratifié l'Accord en en septembre 2016. Mais, en juin 2017, Donald Trump a annoncé son souhait de désengager les Etats-Unis. Cette décision a été officiellement notifiée à la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (Ccnucc) par un courrier daté du 4 août 2017. Compte tenu de ces délais, les Etats-Unis ne pourront pas formellement quitter l'Accord avant le 4 novembre 2020.

Les débris de plastique marins concentreraient des métaux lourds

"Les débris de plastique marins transportent des mélanges complexes de métaux lourds, souligne une étude du CNRS réalisée à partir d'échantillons collectés grâce à une expédition de l'association 7e Continent. Ces matériaux se comportent non seulement comme une source de métaux résultant d'additifs intrinsèques au plastique, mais sont également capables de concentrer les métaux présents dans l'eau de mer sous forme de nanoparticules minérales ou matières adsorbées".

Les scientifiques de l'étude ont analysé des débris de plastique collectés dans le gyre subtropical de l'Atlantique Nord. Ils ont comparé les teneurs en métaux avec ceux présents dans des emballages. "Les résultats démontrent que la concentration de certains métaux comme l'arsenic (As), le titane (Ti), le nickel (Ni) et le cadmium (Cd) augmente avec l'état d'oxydation du plastique", note l'étude. Par exemple, certains plastiques collectés peuvent contenir jusqu'à 4284 µg/g de cadmium alors que les emballages neufs en contiennent moins de 0,01 µg/g.

mercredi 5 décembre 2018

Stable pendant plus de mille ans, la concentration de CO2 dans l’atmosphère a explosé au XXe siècle

EN UN GRAPHIQUE – Malgré les accords de Paris en 2015, les émissions de CO2 ont continué de croître et la concentration dans l’atmosphère a encore atteint un nouveau record en 2017.

Les gaz à effet de serre ont franchi de nouveaux pics de concentration dans l’atmosphère en 2017, et en particulier le CO2, qui est de très loin le principal responsable du réchauffement climatique. L’an passé, la concentration du dioxyde de carbone a atteint 405,5 ppm (parties par million), soit une hausse de 0,32 % par rapport à 2016 et de 5,66 % par rapport à 2007 (où son niveau était de 383,79 ppm). C’est un signal particulièrement inquiétant à quelques jours de la COP24, qui doit finaliser l’accord de Paris adopté en décembre 2015 – elle débute lundi 3 décembre en Pologne. Avant la période industrielle, qui a démarré à la fin du XIXe siècle, la concentration du CO2 était de 278 ppm en moyenne et était restée stable pendant des milliers d’années avant de connaître une hausse du fait des activités humaines : combustion de pétrole, fabrication de ciment, déforestation.

 

Alors que l’augmentation, déjà importante, de la concentration du CO2 dans l’atmosphère était de 0,86 ppm par an pour la décennie 1960, 1,90 ppm pour les années 2000, elle atteint 2,39 ppm par an pour la période 2010-2017. Et la tendance n’est pas à la baisse.

« Les données scientifiques sont sans équivoque. Si l’on ne réduit pas rapidement les émissions de gaz à effet de serre, et notamment de CO2, les changements climatiques auront des conséquences irréversibles et toujours plus destructrices pour la vie sur Terre », a fait savoir l’Organisation météorologique mondiale (OMM, une agence de l’ONU). « La dernière fois que la Terre a connu une teneur en CO2 comparable, c’était il y a 3 à 5 millions d’années : la température était de 2 à 3 °C plus élevée et le niveau de la mer était supérieur de 10 à 20 mètres par rapport au niveau actuel », a ajouté le secrétaire général de l’OMM, Petteri Taalas.

Les fleuristes, victimes ignorées des pesticides : « Si l’on m’avait mise en garde, ma fille serait encore là »

  Dès 2017, des tests menés par  60 millions de consommateurs  sur des roses commercialisées par dix grandes enseignes en France révélaient ...