Dans une étude sur l'évolution du mix électrique français de 2020 à
2060, l'Ademe prévoit une baisse du coût de l'électricité grâce à un
fort développement des renouvelables tandis que la filière EPR se révèle
non compétitive.
C'est une nouvelle étude qui va donner le sourire aux promoteurs des
énergies renouvelables (EnR) et contrarier la filière nucléaire. L'Ademe
a dévoilé ce lundi 10 décembre
une analyse
de l'évolution possible du mix électrique français d'ici 2060. Les
dirigeants de l'établissement public souhaitent éclairer le gouvernement
et les différentes parties prenantes au moment où s'ouvre la
consultation sur la nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie
(PPE),
dévoilée le 27 novembre par Emmanuel Macron, puis
détaillée par François de Rugy.
Après son étude de 2015 qui envisageait une France avec
100% d'électricité renouvelable en 2050, l'Ademe a étudié sept scénarios de transition du mix électrique jusqu'à 2060. "
Le
parti pris dans cet exercice est de rester strictement sur une logique
d'optimisation économique : il s'agit d'évaluer les trajectoires qui
coûteront le moins cher pour la collectivité", explique Arnaud Leroy, président de l'Ademe.
L'étude est basée sur un outil informatique développé par la société
Artelys qui évalue la composition du mix optimal pour minimiser les
coûts de production du système électrique tout en respectant l'équilibre
offre-demande. Plusieurs variables ont été prises en compte comme le
niveau de la demande électrique, le coût des technologies ou encore la
plus ou moins bonne acceptabilité des EnR.
Un coût de 39 milliards pour la Nation
Il ressort de l'étude que "
le développement d'une filière EPR ne serait pas compétitif pour le système électrique français d'un point de vue économique".
La construction d'un seul réacteur supplémentaire de nouvelle
génération en 2030 nécessiterait 4 à 6 milliards d'euros (Md€) de
soutien public en raison de ses coûts trop élevés. "
Nous avons malgré cela développé un scénario « EPR en série »",
explique David Marchal, directeur adjoint Productions et énergies
durables à l'Ademe. Dans cette hypothèse (24 GW en 2060), l'étude
chiffre à 39 Md€ le coût minimal pour la Nation, malgré la prise en
compte des économies d'échelle permises par le développement des EPR en
série (70 €/Mwh).
En revanche, l'étude estime économiquement et climatiquement
efficient le prolongement d'une partie du parc nucléaire historique, en
conformité avec l'objectif de
50 % du mix électrique entre 2030 et 2035. "
Pour
les scénarios étudiés, une fermeture de 30 % des réacteurs à l'âge de
40 ans, puis à nouveau de 30 % des réacteurs restants à 50 ans est
possible avec un coût nul pour la France sur la période 2030-2044", indique l'Ademe.
"
La fermeture systématique des centrales nucléaires à 50 ans
génère des coûts supplémentaires lorsque la capacité nucléaire totale
passe en deçà de 30 GW", indique toutefois l'étude. Par contre, une prolongation trop longue du nucléaire historique "
déséquilibrerait la rentabilité de tous les moyens de production"
en maintenant les prix de marché de gros de l'électricité à un faible
niveau. Ce qui décalerait le seuil de rentabilité des EnR en 2045 mais
diminuerait aussi la marge des producteurs nucléaires de 3,6 Md€ sur la
période 2030-2044.
Plus de 95 % d'EnR en 2060
Cette transition vers la fin du nucléaire s'explique par la forte
montée en puissance des renouvelables, même si elles n'atteindraient pas
100 % du mix électrique en 2050. Des EnR qui se développeraient sans
système de soutien à partir de 2030 pour le photovoltaïque et de 2035
pour l'éolien terrestre dans la plupart des scénarios étudiés.
Pour des niveaux de demande d'électricité compris entre 430 et 600
TWh, l'optimisation économique de l'évolution du système électrique
conduit à "
une part d'EnR de 85 % en moyenne en 2050 et de plus de
95 % en 2060 dans l'ensemble des cas, hormis ceux avec déploiement
volontariste d'EPR", indique l'Ademe. De plus, ajoute David Marchal, "
réduire
la demande d'électricité, grâce à l'efficacité énergétique notamment,
induirait une diminution des coûts totaux du système de 7 % et des
émissions de CO2 de 22 % en 2060 tout en permettant une augmentation des exportations".
Cette optimisation économique de la production devrait conduire à une
baisse du coût total de l'électricité à 90 €/MWh, contre 100 €/MWh
aujourd'hui. Et ce, malgré les coûts d'intégration des EnR ou les coûts
de stockage, et en prenant en compte l'équilibre horaire entre l'offre
et la demande.