Une étude préoccupante réalisée par l'Université de Caen révèle la
toxicité d'un maïs génétiquement modifié et du pesticide Roundup sur
les rats. De quoi s'interroger sur leurs effets sur la santé humaine.
L'équipe du Professeur Séralini de l'Université de Caen publie aujourd'hui dans la revue scientifique américaine
Food and Chemical Toxicology
une étude qui devrait faire grand bruit. Elle révèle la toxicité sur
les rats du maïs transgénique NK 603 tolérant au Roundup, l'herbicide
le plus vendu au monde, et le Roundup lui-même, tous deux produits par
la société américaine Monsanto.
Résultats alarmants
"
Pour la première fois au monde, un OGM
et un pesticide ont été évalués pour leurs impacts sur la santé plus
longuement et complètement que les agences sanitaires, les
gouvernements, les industriels et d'autres chercheurs ne l'ont jamais
fait", indique le
CRIIGEN, dont le Professeur Séralini préside le conseil scientifique.
Le comité considère que les résultats sont alarmants. Les tests,
réalisés sur 200 rats pendant deux ans sur plus de cent paramètres,
révèlent "
des mortalités plus rapides et plus fortes au cours de la consommation de chacun des deux produits". Les chercheurs précisent que "
les
femelles développent des tumeurs mammaires importantes et en grand
nombre et des perturbations hypophysaires et rénales, et les mâles
présentent des atteintes hépato-rénales chroniques sévères".
"
Les implications sont gigantesques", s'alarme le CRIIGEN qui indique que l'étude permet "
de comprendre le mode d'action toxique d'un OGM", dont le caractère est partagé par plus de 80% des OGM alimentaires, "
mais
aussi d'un pesticide à des doses extrêmement faibles équivalentes à
celles trouvées dans les eaux de surface et les eaux de boisson". L'association d'experts voient aussi dans ces résultats une mise en lumière du "
laxisme des agences sanitaires et des industriels dans l'évaluation de ces produits".
La révision des procédures d'évaluation réclamée
Réagissant immédiatement à la publication de l'étude, José Bové
demande à la Commission européenne la suspension immédiate des
autorisations de mise en culture et d'importation d'OGM. "
Nous nous
battons depuis 1996 pour la réalisation de véritables études
toxicologiques sur la dangerosité des OGM pour l'alimentation humaine
et animale, a déclaré le vice-président de la commission de l'agriculture et du développement rural au Parlement européen.
Cette étude montre enfin que nous avons raison et qu'il est urgent de revoir rapidement tous les processus d'évaluation des OGM".
De la même façon, Greenpeace demande à l'UE de "
décréter un moratoire sur tous les OGM résistants aux herbicides en Europe"
et au gouvernement Ayrault de concrétiser son opposition aux OGM en
poussant la Commission à réviser les procédures d'évaluation des OGM "
demandée à l'unanimité par les 27 Etats membres de l'UE en 2008 sous la présidence française" mais restée sans "
suite sérieuse".
Générations Futures,
via son porte-parole François Veillerette, demande aussi que de "
telles
études sur rats pendant deux ans soient immédiatement rendues
obligatoire au niveau européen, afin d'évaluer le risque de la
consommation d'OGM pour l'Homme sur la vie entière, et non pas
seulement sur un durée de quelques mois, comme cela est pratiqué
actuellement".
Autre son de cloche en revanche chez l'Association française des biotechnologies végétales (AFBV) qui estime que "
l'étude du CRIIGEN n'est pas la première à avoir évaluer les effets à long termes des OGM sur la santé". Pour cette ONG "
dont le but est d'informer sur la réalité des biotechnologies végétales",
de nombreuses études toxicologiques évaluant également les effets à
long terme des organismes transgéniques sur la santé des animaux ont
été menées et "
n'ont jamais révélé d'effets toxiques des OGM".
Le Gouvernement saisit l'Anses
Quoi qu'il en soit, le Gouvernement a pris au sérieux les résultats
de cette étude qui, selon le Nouvel Observateur, aurait été financée en
grande partie par la grande distribution soucieuse de ne pas être tenue
responsable d'un nouveau scandale sanitaire. Les trois ministres
concernés par le dossier ont annoncé une saisine immédiate de l'
Anses,
une analyse des résultats de l'étude par le Haut Conseil des
biotechnologies et leur transmission en urgence à l'Autorité européenne
de sécurité des aliments (Efsa).
En fonction de l'avis de l'Anses, le Gouvernement demandera aux
autorités européennes de prendre toutes les mesures nécessaires en
matière de protection de la santé humaine et animale, qui pourront
aller jusqu'à "
suspendre en urgence l'autorisation d'importation
dans l'Union européenne du mais NK 603, dans l'attente d'un réexamen de
ce produit sur la base de méthodes d'évaluation renforcées". En
tout état de cause, les ministres estiment que cette étude valide la
position de précaution prise par le Gouvernement sur le moratoire des
cultures OGM, position qu'a réaffirmée Jean-Marc Ayrault lors de la
Conférence environnementale.
Selon Euractiv, la Commission européenne a également saisi l'Efsa.
Pas sûr toutefois que cette saisine satisfasse toutes les parties, "
cet organisme [s'étant]
distingué depuis de nombreuses années par la proximité flagrante de ses
membres avec les industriels vendant des OGM et son manque
d'indépendance", estime Greenpeace.