jeudi 26 janvier 2023

Troisième record d'affilée

 Toujours plus. Malgré la dégradation de la conjoncture, les sociétés européennes devraient distribuer 387 milliards d'euros de dividendes en 2023, ce qui serait un troisième record d'affilée, à en croire l'étude annuelle du gérant d'actifs AllianzGI. Une générosité qui témoigne de la bonne santé financière des groupes cotés du Vieux Continent. A la Bourse de Paris, les membres de l'indice CAC 40 pourraient ainsi afficher des profits historiques en 2022 en dépit du choc énergétique qui a frappé l'Europe.

Les dividendes européens se sont élevés à 377 milliards en 2021 , et à 382 milliards l'an dernier, selon les chiffres publiés par AllianzGI. 

vendredi 20 janvier 2023

 La réforme des retraites : quelques éléments de réflexion sur les arguments pro-réforme avancés.

On nous dit :

- "Il y a de moins en moins d'actifs par retraités, il faut en conséquence allonger l'âge de la retraite" :

Effectivement, en 1960, il y avait 4 actifs pour un retraité. En 2019, il n'y a plus qu'1,7 actif pour un retraité. Mais dans le même temps, un actif en 2017 produit 3,4 fois plus de richesses qu'en 1960 (en euros constants).

Ce qui fait que pour un retraité en 2019, il y a 1.7 actifs qui produisent l'équivalent de la richesse produite par 5,78 actifs de 1960 (1,7 X 3,4 = 5,78).

Il y a donc en fait plus de ressources.

- " Le système des retraites sera déficitaire dans les années à venir " :

Le Conseil d'Orientation des Retraites (COR), service du premier ministre, a écrit, en page 11 de son dernier rapport de septembre 2022 :

" En 2021, le système de retraite a été excédentaire de près de 900 millions d'euros. (...) Elle se prolongerait en 2022 et le système connaîtrait un excédent de 3,2 milliards d'euros (0,1 point de PIB). "

Donc, pas de déficit actuellement !

Pour information, le COR prévoit ensuite un déficit à partir de 2023 avec un plancher en 2030, avant un retour à l'équilibre à l'horizon 2055. Pourquoi cette détérioration alors que le système est actuellement bénéficiaire ? Le COR donne l'explication suivante (toujours en page 11 de son rapport) :

" La dégradation de la situation financière de début de période (2022-2027) est principalement à relier à la dégradation de la part des ressources dans la richesse nationale : la baisse de la part des traitements indiciaires des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers (...) a un effet négatif sur la part des ressources dans le PIB. "

Pourquoi une baisse des traitements indiciaires notamment hospitaliers, alors que le Ségur de la santé prévoit une augmentation de 15 000 agents ? L'explication est ailleurs, la loi de programmation 2022/2027 prévoit des coupes budgétaires drastiques dans les dépenses publiques. Un rapport sénatorial évoque un "effort de maitrise" à hauteur de 25 milliards d'€ d'économies pour les administrations locales et de 25 milliards d'€ pour les administrations de sécurité sociale. Accessoirement, juste après une épidémie ...

Le déficit du système des retraites qu'anticipe le COR n'est donc pas une fatalité, il résulterait pour la période 2023/2027, de choix budgétaires qui vont affecter ses revenus.

2ème élément donné par le COR pour expliquer le déficit annoncé (en page 11) : "La dégradation du solde global se prolongerait de 2028 à 2032 avec la période de faible croissance liée à la transition du taux de chômage vers sa cible de long terme. "

L'explication de cette phrase se trouve en page 8 :

Il faut raccorder à ce moment-là le taux de chômage prévu par le gouvernement (5%), au taux de chômage prévu par le COR (7%). En raccordant ces 2 courbes, ça les tire vers le bas. Mais d'après le COR lui-même, " il s'agit là d'un artefact lié à la méthode de projection : rien ne permet d'anticiper que la conjoncture économique sera particulièrement déprimée sur la période 2028-2032 ". Donc autrement dit, tout cela n’est pas sûr du tout !

À noter que le COR prévoit un déficit de l'ordre de 12 milliards d'€ en 2030. Actuellement, il y a 80 milliards d'€ d'exonérations de cotisations employeur. Il y a peut-être là un moyen plus efficace de sécuriser le système de retraites ?

- " Les petites pensions seront revalorisées à hauteur de 1200 € " :

Pas pour tout le monde !

1200 €, c'est à peine au-dessus du seuil de pauvreté qui est à 1128 €. Mais pour y avoir droit, il faudra avoir cotisé à taux plein pendant 172 trimestres, soit 43 ans. Beaucoup n'y auront pas droit, par exemple, tous ceux qui ont eu des carrières hachées, des temps partiels, des périodes de chômage, ...

- " La réforme prendra en compte la pénibilité " :

On peut en douter. En effet, les 3 nouveaux critères, facteurs de risques permettant de partir plus tôt avaient été supprimés par Emmanuel Macron en octobre 2017 (passage du Compte Personnel de Prévention de la pénibilité (C3P) par le passage au Compte Personnel de Prévention (C2P)).

Le 4e critère de l'exposition aux produits chimiques dangereux n'est toujours pas rétabli.

- " La réforme conduira à un système à l'équilibre " :

Parmi la génération née en 1954, 4 personnes sur 10 n'étaient plus en emploi au moment de la liquidation de leur retraite (19% au chômage, 7% en maladie ou invalidité, 3 % en préretraite et 13% pour d'autres raisons). Pas sûr que ces chiffres s'améliorent avec une retraite 2 ans plus tard !

Par ailleurs, l'espérance de vie en bonne santé commence à redescendre. Elle est de 63 ans pour les hommes et de 64 ans pour les femmes. Décaler de 2 ans l'âge de la retraite occasionnera davantage d'arrêts de travail, des dépenses de pensions d'invalidité, de prestations de solidarité, d'accidents du travail.

L'Union Confédérale des Retraités FO a estimé à 0,2 points de PIB, la hausse des dépenses hors retraites, suite à un décalage de 2 ans du départ à la retraite.

Sans compter que les emplois non libérés par les seniors, ne pourront pas être pourvus par les jeunes générations !

- Les agents publics pourront travailler jusqu'à 70 ans :

On pourrait comprendre que 64 ans, c'est bien trop tôt !

- Les agents publics pourront cumuler des petits boulots avec leur retraite :

Bizarre, … auront-ils besoin d'arrondir leurs fins de mois malgré cette réforme "si avantageuse" ?!

- Ils pourront partir en pré-retraite :

Oui mais à l'âge où ils auraient pu partir directement en retraite ! Et le temps en pré-retraite ne « cotise » pas à 100%, mais à hauteur de leur temps partiel.

- Les durées de service des personnels actifs et hyper-actifs seront inchangées :

Oui mais ils devront quand même partir 2 ans plus tard !

mardi 17 janvier 2023

L'ONG OXFAM DÉNONCE "LA CONCENTRATION EXTRÊME DES RICHESSES" ET VEUT "ABOLIR" LES MILLIARDAIRES

 "Chaque milliardaire représente un échec de politique publique", avance l'ONG Oxfam dans un rapport publié à l'ouverture du Forum de Davos lundi, militant pour une division par deux de leur nombre d'ici 2030 grâce à la taxation, avant d'"abolir" les milliardaires à plus long terme.

"Les inégalités économiques ont atteint des niveaux extrêmes et dangereux", écrit l'organisation internationale dans son rapport annuel sur les inégalités, au coup d'envoi d'une semaine d'échanges entre élites économiques et politiques dans la station de ski suisse de Davos.

Plus nombreux et de plus en plus riches

Portées par la flambée des cours de Bourse, les grandes fortunes se sont envolées au cours des dix dernières années: sur 100 dollars de richesse créée, 54,4 dollars sont allés dans les poches des 1% le plus aisés, tandis que 70 centimes ont profité aux 50% les moins fortunés, constate l'ONG.

Les milliardaires ont doublé leur fortune, tout en étant de plus en plus nombreux, affirme Oxfam dont la directrice générale, Gabriela Bucher, est invitée en Suisse.

Or, "la concentration extrême des richesses mine la croissance économique, corrompt les politiciens et les médias, corrode la démocratie et augmente la polarisation", écrit l'ONG, ajoutant que les inégalités sont devenues "une menace existentielle pour nos sociétés, paralysant notre capacité à endiguer la pauvreté", et mettent "l'avenir de la planète (...) en péril".L'ONG milite pour un impôt sur la fortune

Selon l'organisation internationale, la taxation a un rôle "crucial" à jouer afin de diminuer le nombre de milliardaires sur la planète, et doit toucher les revenus et le capital des plus aisés.

Parmi les mesures proposées dans ce rapport, un impôt exceptionnel sur la fortune, une taxe sur les dividendes, et une hausse de l'imposition sur les revenus du travail et du capital des 1% les plus riches.

Le capital, une manne financière "beaucoup plus importante que les salaires" pour les grandes fortunes, doit être davantage taxé sur les gains réalisés, notamment grâce à la vente d'actions, mais aussi par la simple détention, souligne l'organisation.

Les "superprofits" des entreprises sont aussi dans le viseur d'Oxfam qui propose de taxer davantage les bénéfices exceptionnels, à l'image des milliards enregistrés par les groupes pétroliers ces derniers mois grâce à la flambée des cours de l'énergie, sur fond de guerre en Ukraine.

Selon l'ONG, ces mesures permettraient de ramener la fortune des milliardaires et leur nombre à ce qu'ils étaient en 2012, avant que les chiffres ne s'emballent.

vendredi 13 janvier 2023

PAC 2023 2027

 

1. Qu'est-ce que la PAC ?

La Politique agricole commune est l'une des plus anciennes politiques communes aux pays membres de l'UE. Créée par le Traité de Rome du 25 mars 1957, elle est entrée en vigueur le 30 juillet 1962 et a donc presque 61 ans.


Elle est régie par trois grands principes : l'unicité des marchés, la préférence communautaire et la solidarité financière. La PAC correspond à des exercices budgétaires européens de sept ans et fait l'objet de réformes ou d'adaptations selon cette même périodicité.


Proposée par la Commission européenne, elle fait l'objet d'âpres discussions avec le conseil des 27 ministres de l'Agriculture des pays membres et le Parlement. Chaque pays essaie alors de faire mieux valoir ses intérêts.


Depuis toujours, deux blocs se sont opposés, l'Europe du Nord, libérale, souhaitant réduire les dépenses liées à l'agriculture et instaurer un genre de laisser-faire, et l'Europe du Sud, qui veut plus de protections. La France, en tant que première puissance agricole européenne, a toujours souhaité préserver cette politique dont elle est la première bénéficiaire. L'adhésion du bloc de l'Est a encore modifié la tonalité des discussions - la répartition budgétaire - et rendu plus difficile l'élaboration de mesures communes en raison de son retard économique.


2. La PAC a-t-elle fait preuve de son utilité ?

Les pères de l'Europe avaient en tête, en créant une Politique agricole commune, de parvenir à l'autonomie alimentaire après la guerre. Un sujet depuis oublié, mais qui a brusquement connu un regain d'actualité avec le Covid puis la guerre en Ukraine.


Entre 1940 et 1945, la population européenne avait connu la faim et les privations, l'Europe était détruite. Il fallait la sortir de la misère et la remettre sur les rails du développement. L'Europe s'est reconstruite à l'ombre des aides du plan Marshall, les Etats-Unis voyant beaucoup d'intérêt à la formation d'un grand espace économique avec lequel commercer. C'était aussi un moyen de freiner l'expansion soviétique.


La mise en place de protections aux frontières et les aides massives au développement de l'agriculture ont permis à l'Europe de nourrir sa population mais aussi de devenir une puissance mondiale. La PAC a donc été un très grand succès de ce point de vue. Elle a permis à certains pays, dont l'Allemagne, de devenir des puissances agricoles. Mais elle a, d'une certaine façon, été victime de son succès, aboutissant à la formation d'excédents coûteux à stocker de viandes, de grains et de produits laitiers. Les réformes des années 1980 ont abouti pour cette raison à la mise en place de quotas.


3. Quels sont les moyens financiers en jeu ?

Quelque 53 milliards d'euros de crédits sont alloués chaque année par Bruxelles aux agriculteurs européens. Le budget de la PAC pour l'agriculture française a été consolidé avec le maintien de l'enveloppe de 9,1 milliards d'euros par an sur la période 2023-2027. La France est la première puissance agricole européenne et, à ce titre, la plus grosse bénéficiaire avec 17 % du budget affecté à la Politique agricole commune (PAC). Cette enveloppe est traditionnellement organisée en piliers. Le premier, qui recouvre les aides directes, est de 6,7 milliards d'euros en France, dont 3,2 milliards pour l'aide au revenu de base.


On y trouve aussi une dotation de 1,7 milliard d'euros pour l'éco-régime, qui remplace le paiement vert et encourage les pratiques environnementales. Une hausse de 2 à 3 % porte l'aide à l'installation des jeunes agriculteurs à 116 millions d'euros. Le deuxième pilier, dédié à la ruralité, dispose d'un budget de 2,4 milliards d'euros, dont 717 millions pour l'agriculture de montagne au travers de l'ICHN (Indemnité compensatoire de handicaps naturels) et 197 millions pour le bio.


4. Pourquoi 27 plans stratégiques nationaux au lieu d'une seule et même PAC ?

Plusieurs pays membres de l'Union européenne ont exprimé leur souhait - certains de longue date, comme l'Irlande, d'autres comme la Pologne qui a rejoint l'UE plus récemment -, de se voir octroyer plus d'autonomie dans leurs choix de politique agricole. Afin de répondre à ces voeux, la Commission européenne a demandé que chacun lui soumette un plan stratégique national (PSN). Les 27 ont ainsi pu, tout en respectant les objectifs environnementaux et économiques de l'exécutif européen, prendre en compte les spécificités de leur agriculture et proposer leur interprétation de la réforme à mettre en oeuvre.


La Commission européenne a renvoyé les copies qui ne répondaient pas suffisamment aux priorités de la nouvelle PAC et les pays membres ont dû amender leur PSN en fonction. Cela a été le cas notamment pour la France, dont les soutiens au bio ont été jugés insuffisants. Au total, la réforme aboutit à une juxtaposition de 27 politiques nationales, si bien que l'on peut parler d'un système à la carte. Un comité de suivi national, chargé de s'assurer des progrès réalisés dans la direction voulue par l'UE, doit se réunir au moins une fois par an.


5. Quelles sont les priorités de la France ?

La France a élaboré un document de 1.000 pages pour définir sa vision et ses intentions en matière de Politique agricole. Il résulte d'une vaste concertation avec les parties prenantes, agriculteurs, forestiers et ruraux, mais également d'une consultation publique. Les soutiens au revenu agricole ont été « consolidés », selon le ministère de l'Agriculture, afin de maintenir les capacités de production sur l'ensemble du territoire. Mais aussi pour aider les agriculteurs à faire face à « la volatilité croissante ».


En réponse aux ambitions européennes de protection de l'environnement, le PSN français encourage la diversité des systèmes de production et « la sobriété en matière d'engrais et de pesticides ». Le texte a été critiqué par les associations de défense de l'environnement et le gouvernement a dû revoir sa copie. Les aides sont dédiées au maintien des prairies et des haies, au développement des assolements et de l'agriculture bio avec un objectif de 18 % de la Surface agricole utile (SAU) en 2027. L'effort de protection de l'élevage de montagne est maintenu. Le soutien aux légumineuses, qui préservent la richesse de la terre, est accru.



Les fleuristes, victimes ignorées des pesticides : « Si l’on m’avait mise en garde, ma fille serait encore là »

  Dès 2017, des tests menés par  60 millions de consommateurs  sur des roses commercialisées par dix grandes enseignes en France révélaient ...