vendredi 26 février 2016

Avec la disparition des pollinisateurs, c'est l'alimentation de millions de personnes qui est menacée

Le déclin des insectes, oiseaux et chauve-souris pollinisateurs menace une partie de la production agricole mondiale... et les populations humaines qui en dépendent.

 MENACE. Les pollinisateurs, insectes ou oiseaux, sont en déclin et certaines espèces sont même en danger d'extinction, ce qui menace une partie de la production agricole mondiale, a prévenu vendredi 26 février 2016 un groupe de scientifiques mandatés par l'ONU pour évaluer le recul de la biodiversité. La Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES en anglais) dresse ce constat inquiétant dans son premier rapport, publié le même vendredi à Kuala Lumpur, et dans un résumé destiné à éclairer les choix des politiques pour enrayer une spirale préjudiciable à l'alimentation des populations. "Un nombre croissant de pollinisateurs sont menacés d'extinction, au niveau mondial, par plusieurs facteurs, dont nombreux sont dus à l'homme, ce qui met en danger les moyens d'existence de millions de personnes et des centaines de milliards de dollars de production agricole", estime le groupe d'experts dans un communiqué.

 Moins de fruits, légumes et graines  

Selon l'IPBES, 5 à 8 % de la production agricole mondiale, soit entre 235 et 577 milliards de dollars, sont directement dépendants de l'action des pollinisateurs sur les cultures (céréales, fruits, etc.). "Sans les pollinisateurs, beaucoup d'entre nous ne pourraient plus être en mesure de consommer du café, du chocolat ou des pommes, parmi bien d'autres aliments de notre quotidien", a commenté Simon Potts, vice-président de l'IPBES et professeur à l'Université de Reading (Royaume-Uni). Il existe plus de 20.000 espèces de pollinisateurs, qu'ils soient sauvages comme les papillons ou les bourdons, ou domestiques, comme l'abeille d'Europe (Apis mellifera) qui fabrique du miel. D'une manière plus générale, au moins trois quarts des cultures mondiales (céréales, fruits, légumes, oléagineux, etc.) dépendent en partie des pollinisateurs pour la croissance des plants, les rendements ou la qualité, notent également les chercheurs associés à la plus vaste expertise jamais réalisée sur le sujet. Contrairement au blé ou au riz, la plupart des fruits et légumes, des oléagineux et certaines céréales, qui constituent "des sources importantes de vitamines et de minéraux", sont des cultures dépendantes de la pollinisation. D'où, la mise en garde des scientifiques face à "une possible hausse des risques de malnutrition".

L'Europe fortement touchée 

Aujourd'hui, 16 % des pollinisateurs vertébrés (oiseaux, chauve-souris) sont menacés de disparition, un chiffre qui va jusqu'à 30 % pour les espèces insulaires, affirment-ils. Pour les insectes, qui constituent le gros du contingent des pollinisateurs, il n'y a pas d'évaluation à l'échelle mondiale, faute de données disponibles partout. Mais "des estimations locales et régionales font état de menaces très élevées, en particulier pour les abeilles et les papillons, avec souvent plus de 40 % des espèces d'invertébrés menacées localement", précisent les scientifiques. L'Amérique du Nord et l'Europe de l'Ouest sont particulièrement touchées par le déclin des pollinisateurs sauvages. En Europe, les populations d'abeilles - sauvages comme domestiques - et de papillons sont en chute libre (respectivement moins 37 % et moins 31 %) et 9 % de ces animaux sont menacés d'extinction. Malgré des données incomplètes pour l'Amérique latine, l'Asie et l'Afrique, les scientifiques estiment que les mêmes tendances sont à l'œuvre dans ces zones.

L'IPBES : le GIEC de la biodiversité

"Le déclin des pollinisateurs sauvages est principalement dû à des changements dans l'utilisation des terres, aux pratiques de l'agriculture intensive et à l'utilisation de pesticides, aux espèces invasives, à des agents pathogènes et au changement climatique", résume Robert Watson, l'un des vice-présidents de l'IPBES. Le groupe d'experts, qui n'émet pas de strictes recommandations, rappelle les moyens, déjà largement connus, pour créer un monde plus favorable aux pollinisateurs : une présence accrue de fleurs sauvages à proximité des cultures, une baisse de l'utilisation des pesticides et un meilleur contrôle des parasites. Ce premier rapport a été rédigé par près de 80 experts et commenté par des centaines d'autres. À l'instar du Groupe d'experts intergouvernemental sur le climat (Giec), l'IPBES est désormais chargé de produire des rapports faisant la synthèse des connaissances sur le déclin des espèces animales et végétales et leurs écosystèmes, qui constituent la biodiversité mondiale.

mercredi 24 février 2016

Océans : la montée des eaux n'a jamais été aussi rapide depuis 3.000 ans

Le niveau des océans monte plus rapidement depuis le siècle dernier que durant les trois derniers millénaires à cause du changement climatique, selon une étude.

 FONTE. Entre 1900 et 2000, les océans et les mers de la planète ont monté d'environ 14 centimètres sous l'effet de la fonte des glaces, notamment dans l'Arctique, ont relevé les chercheurs, dont les travaux sont publiés dans les Comptes rendus de l'Académie américaine des sciences (PNAS).

Un siècle extraordinaire

Ces climatologues ont estimé que sans la hausse de la température planétaire observée depuis le début de l'ère industrielle, la montée des océans aurait été moitié moindre au XXe siècle. Le siècle dernier "a été extraordinaire comparé aux trois derniers millénaires et la montée des océans s'est même accélérée ces 20 dernières années", a souligné Robert Kopp, professeur adjoint au département des sciences de la Terre de l'université Rutgers (New Jersey, est).

D'après cette étude, qui s'est appuyée sur une nouvelle approche statistique mise au point à l'université d'Harvard (Massachusetts), les océans ont baissé d'environ huit centimètres entre l'an mille et 1400, période marquée par un refroidissement planétaire de 0,2 degrés Celsius. "C'est frappant de voir une telle variation du niveau des océans liée à un aussi léger coup de froid du globe", a pointé le professeur Kopp. Actuellement, la température mondiale moyenne est un degré Celsius plus élevée qu'à la fin du XIXe siècle, a-t-il ajouté.
Pour déterminer l'évolution du niveau des océans pendant les trois derniers millénaires, les scientifiques ont compilé de nouvelles données géologiques, indicateurs de l'élévation des eaux comme les marais et les récifs coralliens, et des sites archéologiques.

Les glaces fondent plus vite

Ils ont également utilisé des relevés sur les marées à 66 endroits du globe au cours des 300 dernières années. Ces estimations précises de la variation du niveau des océans au cours des 30 derniers siècles permet de faire des projections plus exactes, a noté Andrew Kemp, professeur des sciences océaniques et de la Terre à l'université Tufts. Les chercheurs ont ainsi estimé que le niveau des océans allait "très probablement monter de 51 cm à 1,3 mètre durant ce siècle si le monde continue à dépendre dans une aussi large mesure des énergies fossiles".

COP 21. Le 12 décembre 2015, 195 pays ont approuvé l'accord de Paris qui prévoit notamment de contenir la hausse des températures à deux degrés par rapport à l'ère pré-industrielle. Si ces engagements conduisaient à une élimination progressive du charbon et des hydrocarbures, cette augmentation pourrait peut-être n'atteindre qu'entre 24 et 60 cm, selon cette étude. "Ces nouvelles données sur le niveau des océans confirment une fois de plus combien cette période moderne de réchauffement est inhabituelle car elle est due à nos gaz à effet de serre", a souligné Stefan Rahmstorf, professeur d'océanographie au Potsdam Institute de recherche sur l'impact du climat, en Allemagne. "Elles montrent que l'impact le plus dangereux de la montée des températures est l'élévation des océans, qui est bien engagée", a-t-il pointé.
"Les glaces fondent plus vite quand les températures montent, c'est de la physique élémentaire", avait-il ironisé par ailleurs. Selon un rapport distinct publié le 22 février 2016, sans le réchauffement de la planète depuis le début de l'ère industrielle et ses effets sur l'élévation des océans, plus de la moitié des 8.000 inondations sur la côte Est des Etats-Unis depuis 1950 ne se seraient pas produites.
Des zones côtières habitées qui se trouvent au niveau de la mer ou en-dessous sont particulièrement affectées, notamment la région de la baie de Chesapeake, sur la côte est des Etats-Unis, ont expliqué les auteurs de cette étude.

jeudi 18 février 2016

Sacré coup de chaud en janvier 2016

RECORD. Janvier 2016 a été le premier mois de l'année le plus chaud enregistré sur le globe depuis le début des relevés de température à la fin du XIXe siècle, a annoncé mercredi l'Agence américaine océanique et atmosphérique (NOAA).

Globalement, la température moyenne à la surface des océans et des terres s'est située à 1,04 degré Celsius au-dessus de la moyenne du XXe siècle, faisant de janvier le premier mois de l'année le plus chaud depuis 1880, surpassant le précédent record établi en 2007 de 0,16°C, a précisé la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration). Janvier 2016 marque également le neuvième mois consécutif durant lequel la température moyenne sur la planète bat un record mensuel, un nouveau record attestant encore du réchauffement planétaire.
L'année 2015 dans son ensemble avait déjà été de loin l'année la plus chaude jamais enregistrée, battant le record de 2014, avait annoncé l'Agence le mois dernier. Décembre 2015 a aussi été le mois le plus chaud jamais enregistré sur la Terre depuis 136 ans. En janvier 2016, la température moyenne sur la planète à la surface des terres a été 1,56°C au-dessus de celle du 20e siècle, en faisant la deuxième plus élevée jamais mesurée.
Sur les océans, janvier a dépassé de 0,86°C la moyenne du 20e siècle et a été le plus chaud pour ce mois de l'année depuis 1880, dépassant le précédent record en 2010 de 0,25°C. La couverture neigeuse et de glace dans l'hémisphère nord a par ailleurs été de 1,9 million de km2 plus grande que la moyenne de la période 1981-2010, selon l'observatoire de la neige Rutgers qui a utilisé des données satellitaire de la NOAA. Cette superficie a été la neuvième plus étendue dans l'hémisphère nord depuis 50 ans, période depuis laquelle ces mesures sont effectuées.
NINO. En Amérique du Nord, l'étendue de neige et de glace a été la sixième plus grande en janvier sous l'effet en grande partie du courant équatorial chaud du Pacifique, El Nino, réapparu l'an dernier et qui devrait persister jusqu'au début du printemps.
Mais la superficie des glaces dans l'océan arctique a été en janvier  de 7,14 %, soit 1,06 million de km2, en dessous de la moyenne de 1981-2010 et 90.649 km2 inférieure au précédent record de 2011, selon les analyses du Centre national de la neige et de la glace (NSIDC) s'appuyant sur des données de la NOAA et de la Nasa.
L'étendue des glaces de l'océan antarctique a, quant à elle, été en janvier de 4,26 %, soit 2,07 millions de km2 sous la moyenne de la même période, ce qui en fait la seizième plus faible depuis 2011.

lundi 8 février 2016

Pesticides : la réglementation européenne ne protégerait pas les milieux aquatiques

La réglementation européenne actuelle sur les pesticides ne permettrait pas de protéger les écosystèmes aquatiques, selon une étude scientifique publiée dans Environmental Science and Pollution Research, mise en lumière par l'association Générations futures.

Les chercheurs ont réalisé une analyse d'études publiées par leurs pairs, pour en extraire les concentrations d'insecticides agricoles mesurées dans les eaux de surface de l'UE et les comparer aux concentrations acceptables règlementaires (CAR) provenant de documents d'homologation européenne des pesticides. "Pour pouvoir autoriser une matière active, les évaluateurs doivent calculer que les concentrations aquatiques prévues de cette matière active pesticide ne doivent pas excéder la CAR calculée", souligne l'association. Or, les scientifiques ont constaté que pour 44,7% des 1.566 mesures recensées, la concentration des pesticides dépassait leur CAR respectif.

"37,1% des concentrations d'insecticides mesurées dans les eaux de surface en Europe dépassaient leurs concentrations acceptables règlementaires. Pour les sédiments, le résultat est encore pire puisque ce sont 93% des concentrations d'insecticides mesurées dans les sédiments en Europe qui dépassaient leurs concentrations acceptables règlementaires", détaille l'association.

Les auteurs de l'étude pointent également que les dépassements étaient significativement plus élevés notamment pour les insecticides de la classe des pyréthroïdes. Selon eux, une révision de la réglementation et des mesures d'atténuation sont nécessaires "d'urgence" pour réduire les risques environnementaux liés à l'utilisation d'insecticides agricoles.

"Cette étude amène des éléments qui viennent s'ajouter à d'autres qui montrent une sous-estimation du risque de nombreux pesticides pour les abeilles (néonicotinoïdes) ou la santé humaine (glyphosate par exemple)", a souligné François Veillerette, porte-parole de Générations Futures.

Les fleuristes, victimes ignorées des pesticides : « Si l’on m’avait mise en garde, ma fille serait encore là »

  Dès 2017, des tests menés par  60 millions de consommateurs  sur des roses commercialisées par dix grandes enseignes en France révélaient ...